Page:Berrichon - Jean-Arthur Rimbaud, 1912.djvu/147

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Tout à la guerre, à la vengeance, à la terreur.
Mon esprit tournons dans la morsure : Ah, passez,
Républiques de ce monde ! Des empereurs,
Des régiments, des colons, des peuples assez !

Qui remuerait les tourbillons de feu furieux,
Que nous et ceux que nous nous imaginons frères ?
A nous, romanesques amis : ça va nous plaire !
Jamais nous ne travaillerons, ô flots de feux !

Europe, Asie, Amérique, disparaissez.
Notre marche vengeresse a tout occupé,
Cités et campagnes ! — Nous serons écrasés !
Les volcans sauteront ! Et l’Océan frappé…

Oh ! mes amis ! — Mon cœur, c’est sûr, ils sont des frères :
Noirs inconnus, si nous allions ! Allons ! Allons…
Ô malheur ! je me sens frémir, la vieille terre,
Sur moi de plus en plus à vous ! la terre fond.


Nous croyons pouvoir, sans crainte de nous méprendre, attribuer ces vers de destruction, ce « vertige tourbillonnant dans un sarcasme féroce, à l’influence de l’absinthe. Ils ont été faits à Paris, dans un café et en présence d’amis, au commencement de 1872 ou plutôt fin 1871. Après coup, le poète, revenu au calme, y a ajouté, afin qu’on ne se méprît pas, ce commentaire ironique


Ce n’est rien ; j’y suis, j’y suis toujours.