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JEAN-ARTHUR RIMBAUD

il écrit au professeur de rhétorique cette lettre :

Paris, le 5 septembre 1870.
Cher Monsieur,

Ce que vous me conseilliez de ne pas faire, je l’ai fait je suis allé à Paris, quittant la maison maternelle J’ai fait ce tour le 2() août. Arrêté en descendant de wagon pour n’avoir pas un sou et devoir treize francs de chemin de fer, je fus conduit à la préfecture, et, aujourd’hui, j’attends mon jugement à Mazas Oh ! J’espère en vous comme en ma mère ; vous m’avez toujours été comme un frère : je vous demande instamment cette aide que vous m’offrîtes. J’ai écrit à ma mère, au procureur impérial, au commissaire de police de Charleville ; si vous ne recevez de moi aucune nouvelle mercredi, avant le train qui conduit de Douai à Paris, prenez ce train, venez ici me réclamer par lettre, ou en vous présentant au procureur, en priant, en répondant de moi, en payant ma dette ! Faites tout ce que vous pourrez, et, quand vous recevrez cette lettre, écrivez, vous aussi, je vous l’ordonne, oui, écrivez à ma pauvre mère (quai de la Madeleine, 5, Charleville) pour la consoler ; écrivez-moi aussi : faites tout ! Je vous aime comme un frère, je vous aimerai comme un père[1]. Je vous serre la main. Votre pauvre

Arthur Rimbaud,
Mazas.
  1. Tous les mots soulignés de cette lettre l’ont été par Rimbaud.