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dirait un pèlerin cousu de coquilles ; — et sous les murs de Dijon, au-delà des meix de l’abbaye de Saint-Bénigne, le cloître de la Chartreuse, blanc comme le froc des disciples de saint Bruno.

» La Chartreuse de Dijon ! le Saint-Denis des ducs de Bourgogne[1] ! Ah ! pourquoi faut-il que les enfants soient jaloux des chefs-d’œuvre de leurs pères ! Allez maintenant où fut la Chartreuse, vos pas y heurteront sous l’herbe des pierres qui ont été des clefs de voûtes, des tabernacles d’autels, des chevets de

  1. Je ne compare la Chartreuse de Dijon à l’abbaye de Saint-Denis que sous le rapport de la magnificence et de la richesse de ses sépultures. Trois ducs seulement ont été inhumés à la Chartreuse, Philippe-le-Hardi, Jean-sans-Peur, et Philippe-le-Bon ; et je n’ignore pas que l’Église de Cîteaux avait communément reçu, depuis Eudes ier, les dépouilles des ducs de la première et de la seconde race royale. — C’est Philippe-le-Hardi qui fonda la Chartreuse en 1383. Tout n’y était que lambris de bois d’Irlande, que chasubles et tapis de drap d’or, que courtines d’étoffes de Chypre et de Damas, que bénitiers et chandeliers d’argent, que lampes de vermeil,