Page:Bertrand - D’Alembert, 1889.djvu/104

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plans arrangés pour le servir. Mme du Deffant lui promettait une place à l’Académie française ; d’Alembert l’acceptait volontiers, mais à la condition de ne faire la cour à personne, de parler librement sur tous les sujets, et peut-être, sans l’avouer, de se montrer d’autant plus raide ou plutôt plus taquin — la raideur n’était pas son genre — qu’on pouvait davantage lui être utile.

Mme du Deffant, protectrice déjà de plus d’une candidature, n’avait rien rencontré de pareil : Il choisit bien son temps pour jouer les Alceste ! Tant qu’il voudra quand on l’aura nommé. L’Encyclopédie est en vue, il suffit d’y brûler quelques grains d’encens. Un mot dans un tel livre peut faire un ami et ne doit rien coûter à une conscience raisonnable ! Le président Hénault, auteur d’une histoire chronologique de France, était académicien ; Mme du Deffant était son amie après avoir été un peu plus, mais bien peu, s’il faut l’en croire. Lorsque, n’étant plus jeune, elle résolut, tout en restant philosophe, de rendre son genre de vie plus édifiant, d’éloigner les occasions et de renoncer aux habitudes compromettantes, elle ajoutait, en l’annonçant : « Quant au président Hénault, je ne compte pas lui faire l’honneur de renoncer à lui ».

Elle l’aimait assez pour vouloir dans l’Encyclopédie une louange pour son livre, ou s’intéressait assez à d’Alembert pour désirer dans sa candidature le protecteur zélé que cette louange devait assurer.

D’Alembert ne voulait rien comprendre : le talent