Page:Bertrand - D’Alembert, 1889.djvu/132

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sûr d’avoir la société pour ennemie. Jamais républicain n’aima la patrie comme chaque jésuite aime sa société. Le dernier de ses membres s’intéresse à sa gloire, dont il croit qu’il rejaillit sur lui quelques rayons. Ce n’est pas sans raison qu’on les a définis une épée dont la pointe est à Rome.

« Cet attachement des jésuites à leur compagnie ne peut être que l’effet de l’orgueil qu’elle leur inspire et nullement des avantages qu’elle procure à chacun de ses membres. Le mérite modeste ou borné au travail de cabinet y est méconnu, peu considéré, quelquefois persécuté si l’intérêt de la société le demande.

« À tous ces moyens d’augmenter leur considération et leur crédit, ils en joignent un autre, non moins efficace. C’est la régularité de la conduite et des mœurs. Leur discipline sur ce point est aussi sévère que sage, et, quoi qu’en ait publié la calomnie, il faut avouer qu’aucun ordre religieux ne donne moins de prise à cet égard. Ceux d’entre eux qui ont enseigné la morale la plus monstrueuse, qui ont écrit sur les matières les plus obscènes, ont mené la vie la plus édifiante et la plus exemplaire. C’était au pied du crucifix que le père Sanchez écrivit ses abominables et dégoûtants ouvrages, et on a dit en particulier d’Escobar, également connu par l’austérité de ses mœurs et le relâchement de sa morale, qu’il achetait le ciel bien cher pour lui-même et le donnait à bon marché aux autres. »

D’Alembert raconte l’histoire des lettres de change