Page:Bertrand - D’Alembert, 1889.djvu/137

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

À propos du jésuite Malagrida, brûlé à Lisbonne pour de bien faibles motifs, d’Alembert ajoute : « C’est une chose plaisante que l’embarras où les jésuites et les jansénistes se trouvent à l’occasion de cette victime immolée par l’Inquisition. Les jésuites, dévoués jusque-là à ce tribunal de sang, n’osaient plus en prendre le parti depuis qu’il avait brûlé un des leurs. Les jansénistes commençaient à le trouver juste dès qu’il eut condamné un jésuite aux flammes. Ils assurèrent et imprimèrent que l’Inquisition n’était pas ce qu’ils avaient cru jusqu’alors, et que la justice s’y rendait avec beaucoup de sagesse et de maturité. »

On aimerait à voir d’Alembert et Voltaire plus humains et moins aveuglés par la passion que les chrétiens fort imparfaits qu’ils attaquent ; ni l’un ni l’autre n’aurait allumé ni regardé le bûcher, mais ils en riaient et de loin feignaient d’y penser avec plaisir. D’Alembert, à l’occasion de la tragédie d’Olympie faite par Voltaire en six jours, lui écrit :

« Donnez-nous vite votre œuvre des six jours, mais ne faites pas comme Dieu et ne vous reposez pas le septième. Ce n’est point un plat compliment que je prétends vous faire ; mais je ne vous dis que ce que j’ai déjà dit cent fois à d’autres. Vos pièces seules ont du mouvement et de l’intérêt et, ce qui vaut bien cela, de la philosophie, non pas de la philosophie froide et parlière, mais de la philosophie en action. Je ne vous demande plus d’échafaud, je sais et je res-