Page:Bertrand - D’Alembert, 1889.djvu/78

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

La physique mathématique, l’astronomie et, quand le raisonnement se trouve impuissant à tout enchaîner, la physique expérimentale, sont nées de ce mouvement rétrograde fait par l’esprit.

Entre les limites très éloignées de nos « connaissances certaines, dont l’une est l’idée de nous-même et l’autre cette partie des mathématiques qui a pour objet les propriétés générales des corps, se trouve un intervalle immense où l’intelligence suprême semble avoir voulu se jouer de la curiosité humaine, tant par les nuages qu’elle y a répandus sans nombre que par quelques traits de lumière qui semblent échapper de distance en distance pour nous attirer.

« La nature de l’homme, dont l’étude est si nécessaire, est un mystère impénétrable à l’homme même quand il n’est éclairé que par la raison seule.

« Rien ne nous est donc plus nécessaire qu’une religion révélée qui nous instruise sur tant de divers objets. Destinée à servir de supplément à la connaissance naturelle, elle nous montre une partie de ce qui était caché, mais elle se borne à ce qu’il nous est absolument nécessaire de connaître. Le reste est fermé pour nous et apparemment le sera toujours. Quelques vérités à croire, un petit nombre de préceptes à pratiquer, voilà à quoi la religion révélée se réduit : néanmoins, à la faveur des lumières qu’elle a communiquées au monde, le peuple même est plus ferme et plus décidé sur un grand nombre de questions intéressantes que ne l’ont été toutes les sectes de philosophes. »