Page:Bertrand - D’Alembert, 1889.djvu/82

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quité. Le style convient au sujet ; il est digne à la fois des grandes questions qu’on aborde, des grands hommes que l’on juge et du grand esprit qui révèle sa puissance.

« Les chefs-d’œuvre que les anciens nous avaient laissés dans presque tous les genres, avaient été oubliés pendant douze siècles. Les principes des arts et des sciences étaient perdus, parce que le beau et le vrai, qui semblent se montrer de toutes parts aux hommes, ne les frappent guère à moins qu’ils ne soient avertis. Ce n’est pas que ces temps malheureux aient été plus stériles que d’autres en génies rares. La nature est toujours la même ; mais que pouvaient faire ces grands hommes semés de loin en loin, comme ils le sont toujours, occupés d’objets différents et abandonnés sans culture à leurs lumières ? Les idées qu’on acquiert par la lecture et par la société sont le germe de presque toutes les découvertes.

« C’est un air que l’on respire sans y penser et auquel on doit la vie ; les hommes dont nous parlons étaient privés d’un tel secours. »

Celui qui inventa les roues et les pignons eût inventé les montres dans un autre siècle, et Gerbert au temps d’Archimède l’aurait peut-être égalé.

D’Alembert semble plus heureux qu’embarrassé de l’immensité de sa tâche. Il trace avec ardeur et vivacité le tableau des progrès de la poésie. Ses jugements parfois peuvent causer quelques surprises.

« Au lieu d’enrichir la langue française, on chercha