Page:Bertrand - Gaspard de la nuit, éd. Asselineau, 1868.djvu/203

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Soleil, firmament, terre et homme, tout avait commencé, tout avait fini. Une voix secoua le néant. — « Soleil ? appela cette voix, du seuil de la radieuse Jérusalem. — Soleil ? répétèrent les échos de l’inconsolable Josaphat. » — Et le soleil ouvrit ses cils d’or sur le chaos des mondes.

Mais le firmament pendait comme un lambeau d’étendard. — « Firmament ? appela cette voix, du seuil de la radieuse Jérusalem. — Firmament ? répétèrent les échos de l’inconsolable Josaphat. » Et le firmament déroula aux vents ses plis de pourpre et d’azur.

Mais la terre voguait à la dérive, comme un navire foudroyé qui ne porte dans ses flancs que des cendres et des ossements. « Terre ? appela cette voix, du seuil de la radieuse Jérusalem. — Terre ? répétèrent les échos de l’inconsolable Josaphat. » — Et la terre ayant jeté l’ancre, la nature s’assit, couronnée de fleurs, sous le porche des montagnes aux cent mille colonnes.

Mais l’homme manquait à la création, et tristes étaient la terre et la nature, l’une de l’absence de son roi, l’autre de l’absence de son époux. — « Homme ? appela cette voix, du seuil de la radieuse Jérusalem. — Homme ? répétèrent les échos de l’inconsolable Josaphat. » Et l’hymne de délivrance et de grâces ne brisa point le sceau dont la mort avait plombé les lèvres de l’homme endormi pour l’éternité dans le lit du sépulcre.