Page:Bertrand - Gaspard de la nuit, éd. Asselineau, 1868.djvu/274

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fait pendre un homme comme un chien, on meurt comme un chien ! » Mais Duguesclin continua :

— « Vous faut-il de l’or? En voilà. Que ne le disiez-vous donc plus tôt? Le roi mon maître, qui vous aime, vous eût accordé riche guerdon. Je sais bien qu’il fait mauvais vivre en ce pays sans argent. Aussi, voulez-vous m’en croire, allons ensemble rançonner cette canaille d’Espagne, mécréans et infâmes, qui ont tant d’or qu’ils ne savent qu’en faire. Nous aiderons, si bien vous en prend, Transtamare que vous savez, à reconquérir l’Espagne, son royal héritage, et à pourchasser les M aures qui sont des Philistins. Nos affaires terminées à notre joie, nous reviendrons riches et puissants, grâces à Dieu. Soldats, ce voyage vous duit-il ? »

La foule déclara aussitôt le Fauconnier traître et déloyal : on le demandait à grands cris, pour le livrer à la justice du roi ; toutes les grandes compagnies se portèrent tumultueusement vers Châlon. Chacun fut bien surpris de voir que Thomas ne pendait plus au gibet : un autre cadavre, dépouillé, percé de coups, arrêtait seul à sa place les regards des passants ; quelques soldats affirmèrent que ce devaient être les restes du Fauconnier assassiné. Quoi qu’il en soit, dès le soir même, l’armée se mit en marche pour Avignon, séjour des prélats romains. Là se trouvait le trésor de l’Eglise, lequel attira peut-être les soldats de Châlon comme l’aimant attire le fer.