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CINQUIÈME PARTIE

I

SUR LES PAS DE CYPRIEN

Cécilius revit sa maison de Muguas, mais avec des yeux nouveaux. Quand il aperçut, derrière les cimes des platanes, les tourelles quadrangulaires de l’antique logis, il lui sembla qu’un abîme l’en séparait, que des siècles s’étaient écoulés depuis son départ. Là-haut, sous les arcades de la loggia, c’étaient les appartements déserts de Birzil. Maintenant, il songeait à elle sans amertume. Sa première pensée fut de lui transmettre au plus tôt le vœu de Cyprien. Il ne s’était pas détaché de sa fille, pour s’être guéri de son affection jalouse. Il croyait seulement l’aimer véritablement, d’un autre amour plus lumineux, plus profond, plus sûr. Il se sentait lui-même un autre homme. Il commençait une vie nouvelle. Le sang du martyr était comme un fleuve de flamme entre lui et son passé.

Il arriva de bonne heure à la villa, s’étant mis en route avant l’aube. Deux palefreniers l’escortaient. Trophime, parti de Carthage un jour plus tôt, était depuis la veille à Muguas, où il faisait tout préparer pour le retour du maître. Comme Cécilius longeait la partie basse de ses