Page:Bertrand - Sanguis martyrum, 1918.djvu/296

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et les racines et vint buter à demi mort dans un trou peu profond qui, par bonheur, arrêta sa chute…

Bientôt, la douleur le ranima. On le battait à coup de nerfs de bœuf.

Hildemond, grinçant des dents, était devant lui : il ricanait :

« Ah ! ah ! mon cher sénateur, je vais envoyer ta Claritude à quelques centaines de pieds sous la terre pour lui apprendre la discipline. »

C’était, en effet, une faute grave que Cécilius venait de commettre. Il avait interrompu la chaîne. On avait dû lui chercher un remplaçant, faire venir un homme de Sigus, de sorte que le travail ne put reprendre que deux heures plus tard.

Le lendemain, on le détacha de son compagnon de chaîne, l’Italien de Réate, et on lui annonça qu’il allait descendre dans la mine.


Il ne fut pas seul pour cette funèbre descente. On lui fit prendre son rang dans une colonne de condamnés punis pour une défaillance légère, ou victimes comme lui de la malveillance d’un chef. Par une ouverture creusée au flanc de la montagne, étroite comme une entrée de cave, ils s’engouffrèrent, les entraves aux chevilles, dans une galerie inclinée, dont la pente était si rapide qu’il fallait se cramponner à une corde tendue le long de la paroi pour ne pas rouler jusqu’en bas.

Cécilius sentait ses jambes flageoler sous le poids de son corps. Les tendons de ses muscles, froissés par un labeur insolite, se contractaient douloureusement. Il glissait sur des échelons de bois à demi enfoncés dans la terre gluante et continuellement détrempés par les infiltrations souterraines. L’homme qui le précédait retenait sa chute. Les malheureux se soutenaient mutuellement comme ils pouvaient, s’avertissaient des passes difficiles, s’épaulaient au moindre trébuchement. Ils avançaient d’un pied tâtonnant, ils s’enfonçaient lentement dans