Page:Bever-Léautaud - Poètes d’aujourd’hui, I, 1918.djvu/330

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J’entends des voix dans mon sommeil
Si nonchalamment apparues !
Et des lys s’ouvrent en des rues
Sans étoiles et sans soleil.

Et ces élans si lents encore
Et ces désirs que je voulais,
Sont des pauvres dans un palais,
Et des cierges las dans l’aurore.

J’attends la lune dans mes yeux
Ouverts au seuil des nuits sans trêves,
Afin qu’elle étanche mes rêves,
Avec ses linges lents et bleus.

(Serres chaudes.)


VERRE ARDENT


Je regarde d’anciennes heures,
Sous le verre ardent des regrets ;
Et du fond bleu de leurs secrets
Émergent des flores meilleures.

Ô ce verre sur mes désirs !
Mes désirs à travers mon âme !
Et l’herbe morte qu’elle enflamme
En approchant des souvenirs !

Je l’élève sur mes pensées,
Et je vois éclore au milieu
De la fuite du cristal bleu,
Les feuilles des douleurs passées.

Jusqu’à l’éloignement des soirs
Morts si longtemps en ma mémoire,
Qu’ils troublent de leur lente moire,
L’âme verte d’autres espoirs.

(Serres chaudes.)