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mais nous dirons que M. Benjamin Delisle fut envoyé en prison pour le reste de la session, en vertu d’une résolution « foudroyante » et superlativement hyperbolique[1], et qu’on parla de faire subir la même peine au colonel Eden, député adjudant-général, pour avoir dit qu’il ne pouvait remettre sans la permission du gouverneur, ou commandant des forces, un papier qu’on lui demandait[2]. La permission qui lui fût finalement donnée par le gouverneur, de remettre le papier en question empêcha seule, peut-être, que les choses ne fusent poussées aux extrémités, d’après les exemples de la Jamaïque, en 1808, et du Haut-Canada, en 1828[3]. Le détail de ce qui se passa et se dit, en cette occasion avait tout l’air d’avoir été emprunté aux pages d’un extravagant romancier, qui aurait pris son sujet dans le moyen-âge, ou chez un peuple à peine civilisé.

Quelques jours avant ce brouhaha, une altercation très vive et des inculpations réciproques entre M. Papineau et M. Cuvillier, amenées encore par l’enquête sur l’affaire du 21 mai, avaient paru menacer de conséquences sérieuses, et plus tard, M. Ralph Tay-

  1. « Résolu : Que Benjamin Delisle, dans son examen devant ce comité, ayant donné volontairement et malicieusement faux témoignage, s’est rendu coupable d’un grand forfait, et d’une infraction des priviléges de cette chambre. »
  2. « Le papier en question n’est autre chose qu’un rapport du colonel McDougall, sur un incendie, à Montréal, en novembre et dans lequel il dit que les troupes doivent avoir un magistrat avec elles, lorsqu’elles vont aux incendies. » — Gazette de Québec.
  3. L’assemblée avait été plus loin, en 1815, sinon par paroles, du moins par action, en décrétant de prise de corps un conseiller législatif, non pas comme tel, à la vérité, mais comme clerc ou greffier de la couronne en chancellerie, d’où il résulta que la « discorde éclata entre les deux branches de la législature ». Un écrivain, correspondant de la Minerve en 1836, qui paraît regretter que la discorde n’ait pas éclaté aussi entre la chambre d’assemblée et le gouverneur, raconte ainsi la chose :

    « La chambre demanda que le clerc de la couronne en chan-