Page:Bibaud - Les fiancés de St-Eustache, 1910.djvu/24

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
16
LES FIANCÉS DE ST-EUSTACHE

cœur, l’harmonie des traits est un masque superbe pour dissimuler et tromper. Le gant de soie, lui aussi, est très doux, on peut le mettre en toute circonstance ; s’il fait chaud, il se prête à merveille dessinant bien la main sans la suffoquer, s’il fait froid, c’est encore mieux, il glisse comme un charme ; mais au moment suprême, crac, le voilà qui se fend, sans que vous vous en aperceviez, sans que vous le soupçonniez même, des ouvertures béantes se sont formées au bout de vos doigts ; le voisin, la voisine, vous regardent, vous examinent, vous n’en savez le pourquoi, ce n’est qu’en rentrant chez vous, en enlevant le gant perfide que vous avez le mot de l’énigme. Écoutez je vais vous raconter une triste histoire pour vous prouver combien ma comparaison est juste.

— Dites. Mademoiselle, je suis fort curieux de l’entendre.

— Oh ! ne riez pas, je ne pourrais vous en faire le récit.

— Je ne ris plus, j’écoute.

— Bien alors. Ce que je vais vous narrer est triste et vrai, il faut être toute oreille.

— Et tout cœur.

— C’est parfait. Si l’anecdote vous intéresse je vous donne la permission de la mettre dans votre prochain roman.

— Vous connaissez les acteurs ?

— Sans doute. Je ne les nommerai pas, peu