Page:Binet - L’étude expérimentale de l’intelligence.djvu/160

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réflexion, d’élaboration que les images concrètes ; dans un acte d’idéation, elles précèdent plus souvent qu’elles ne suivent les images plus détaillées.

Maintenant, de telles images constituent-elles en elles-mêmes une pensée générale ? Je ne le crois pas ; pour qu’il y ait pensée générale, il faut quelque chose de plus : un acte intellectuel consistant à utiliser l’image. Notre esprit, s’emparant de l’image, lui dit en quelque sorte : puisque tu ne représentes rien en particulier, je vais te faire représenter le tout. Cette attribution de fonction vient de notre esprit, et l’image la reçoit par délégation. En d’autres termes, la pensée du général vient d’une direction de la pensée vers l’ensemble des choses, c’est, pour prendre le mot dans son sens étymologique, une intention de l’esprit.

En fin de compte nous voyons que tous les théoriciens de la généralisation ont eu raison ; s’il existe une âme de vérité dans les systèmes les plus opposés, c’est que les formes d’images dont la pensée se sert pour arriver au général ne sont qu’un accessoire ; la pensée générale n’est expliquée, à proprement parler, ni par le nominalisme, ni par le réalisme, ni par le conceptualisme, mais bien, qu’on me passe ce mot nouveau, par l’intentionisme.