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LES IDÉES MODERNES SUR LES ENFANTS

II

mesure de la mémoire des écoliers

Tous les éducateurs savent que la mémoire est un don que la nature n’a pas distribué équitablement, et en quantités égales à tous les élèves. Quelques-uns ont beaucoup de difficulté à apprendre et à retenir, soit qu’ils présentent une faiblesse originelle de la mémoire, soit qu’ils aient été atteints dans leurs facultés par une maladie antérieure. D’autres apprennent vite, facilement, presque sans effort, en se jouant. Il y en a qui gardent le souvenir d’une leçon longtemps, avec ténacité ; il y en a d’autres qui ont besoin de repasser souvent la leçon apprise, sinon ils en perdent totalement le souvenir. Les maîtres ont beaucoup de raisons très importantes et très sérieuses pour chercher à connaître avec autant d’exactitude que possible la capacité de mémoire de leurs élèves ; la première raison est de valeur morale. D’ordinaire, quand un enfant a mal su sa leçon, on lui marque une mauvaise note ou une punition. On fait cela presque automatiquement, sans réfléchir. Il est cependant d’une justice élémentaire de chercher d’abord si le jeune délinquant a bien réellement manqué d’application, car ce n’est pas sa mémoire qu’on doit punir, c’est sa paresse. Quand un enfant est incapable de réciter sa leçon, cela ne prouve rien, ce n’est qu’un fait, un résultat, et, ce résultat a besoin d’être expliqué. Est-ce la faute de l’enfant s’il ne sait pas sa leçon ? Quel est le temps qu’il a mis à l’apprendre ? Quels sont les efforts qu’il a dépensés ? Quelles sont les causes de distraction qui l’ont troublé ? Voilà ce qu’on ne sait pas. Dans le cas où l’enfant a une mémoire rebelle, lui marquer une mauvaise note, c’est commettre une injustice ; c’est aussi le décourager, c’est même le démoraliser. Il vaudrait