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LA MÉMOIRE

la fraîcheur mentale du matin. Les expériences ont été poursuivies sur les écoliers ; ce sont des expériences qui ont trait à la fatigue intellectuelle ; celle-ci a été étudiée par beaucoup de petits moyens, qui sont très ingénieux, très précis, et qui montrent avec beaucoup d’éloquence, non pas si un sujet quelconque, pris à part, est fatigué, — la méthode à ce point de vue ne vaut rien, — mais si toute une classe d’écoliers est fatiguée. On a employé par exemple la méthode de la dictée, celle des exercices de calcul, celle aussi de la mesure de la sensibilité cutanée ; et on a vu que c’est surtout pendant la classe du matin que les élèves, pris en bloc, font le moins de fautes d’orthographe, calculent le plus vite, ont la sensibilité tactile la plus fine, et sont par conséquent en possession de tous leurs moyens. Pour ne citer qu’un seul exemple, donnons celui-ci : un groupe d’élèves qui le matin, avant la classe, ne fait que 40 fautes dans une dictée, en a fait 70 après une heure de classe, 160 après deux heures, 190 après trois heures (Friedrich)[1].

Tirant parti de ces remarques, nous choisirons les premières heures du matin pour l’étude d’un morceau à apprendre par cœur.

Mais cette règle n’est pas sans exception. Beaucoup de personnes prennent l’habitude de travailler le soir et fort avant dans la nuit ; elles se lèvent tard, et dans la matinée elles sont encore fatiguées, somnolentes, mal disposées à l’effort. Et d’autre part, en ce qui concerne particulièrement la mémoire, quelques personnes ont remarqué que si on lit la leçon le soir, on la trouve sue au réveil, comme si pendant la nuit l’inconscient s’était réveillé pour répéter la leçon et l’apprendre. Nous reviendrons dans un instant sur le rôle

  1. Pour l’ensemble des méthodes servant à la mesure de la fatigue scolaire, voir Binet et Henri, La Fatigue intellectuelle, Paris, Schleicher, 1898 ; et voir aussi Binet, la Mesure de la fatigue intellectuelle, Année Psychologique, 1903, p. 1.