Page:Binet - Les Idées modernes sur les enfants.djvu/291

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miers, ni les derniers, mais parmi les moyens. Dans les notes afférentes à chacun d’eux, on lit presque constamment : a une bonne main, est hardi dans les manipulations, est soigneux, a du goût. Donc si ces anormaux sont inférieurs en calcul, en orthographe, en lecture, c’est-à-dire pour l’intelligence verbale, ils ne présentent pas, loin de là, autant d’infériorité pour l’intelligence sensorielle. De presque tous ses élèves anormaux le professeur a pu écrire : fera un bon ouvrier.

À la lumière de ces remarques, l’enfant anormal nous apparaît comme un être qui est arrêté à une phase antérieure de son développement intellectuel ; on le savait sans doute, mais on ignorait en quoi consistait au juste cet arrêt de développement intellectuel. On le comprend mieux quand on apprend que l’intelligence de l’enfant est d’abord sensorielle, qu’elle se sert surtout d’images sensibles, d’expériences concrètes, et que c’est plus tard qu’apparaît l’intelligence verbale, qui grâce au mot, permet le développement des idées abstraites et générales.

Parmi les enfants qui sont normaux mais réussissent mal dans leurs études, le type du praticien est aussi répandu. Je citerai quelques-uns des exemples que j’ai recueillis. Dernièrement, nous faisions une enquête avec M. l’Inspecteur Lacabe et M. Bocquillon sur les enfants paresseux, et les causes qui servent à expliquer les insuccès scolaires ; nous avions demandé à plusieurs maîtres de nous éclairer sur la psychologie des élèves formant, dans un classement de mérite, le dernier cinquième de leur classe. Plusieurs des maîtres, croyant donner une explication suffisante, employèrent cette réponse vraiment trop sommaire qui consiste à dire que l’élève manque d’intelligence ou de volonté. Mais quelques-uns, mieux inspirés et surtout plus attentifs, poussèrent l’analyse plus loin ; ils cherchèrent à quel point de vue il fallait incriminer