Page:Biographie des femmes auteurs contemporaines françaises.pdf/325

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fectueux et de jouissances intellectuelles le poids de spéculations plus sévères et d’intérêts plus sérieux. Mais ce fut pour y ajouter un nouveau degré d’activité : ainsi, le bloc de rocher qui tombe au milieu d’une rivière limpide en change tout à coup l’aspect ; mais l’entrave qu’il semble apporter à son cours habituel lui prête plus de mouvement, d’éclat et de vie.

Les heureuses dispositions de la jeune Eliza la rendirent bientôt l’objet des soins particuliers de M. et de Mme Guizot ; elle en profita au delà de leurs espérances. En 1814, la mère d’Eliza contracta un second mariage avec M. Devaisne, directeur général des contributions indirectes dans les départements au delà des Alpes. Les événements de cette époque ayant enlevé ces départements à la France, la place de M. Devaisne se trouva supprimée de fait ; mais à la restauration il fut nommé préfet, d’abord à Bar-le-Duc, et plus tard à Nevers, où il demeura six ans.

Pendant ces six années l’enfant était devenue jeune fille ; son esprit et son âme avaient achevé de se développer ; elle possédait une instruction aussi solide qu’étendue, et cultivait les arts avec succès. Chez elle, un cœur tendre et dévoué, une vive imagination, avaient pour contre-poids une austère et fervente dévotion ; elle était alors zélée catholique, comme on peut le voir par ce qu’elle écrivait à sa sœur, pendant un petit voyage que celle-ci avait fait à Paris avec sa mère :

« N’en déplaise à la Fête-Dieu et à mes oraisons, ma Pauline, je t’écrirai aujourd’hui une longue lettre ; pourtant, que ta conscience se rassure ; j’ai été ce matin à une grand’messe de deux heures, j’ai lu un sermon de Massillon, j’irai à vêpres, et j’aurai encore du temps pour ma bourse particulière. Oui, ma chère Pauline, le salut entre pour beaucoup dans ma vie ; je vais