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autres ; j’aime à adorer mon Dieu au milieu de mes frères ; il me semble qu’il m’en écoute mieux quand je ne le prie pas seule… »

Bientôt sa résignation religieuse fut mise à la plus cruelle épreuve ; elle perdit sa mère, qui mourut au mois de novembre 1823, et resta à dix-huit ans chargée du soin de sa famille et de l’éducation d’un jeune frère du second lit, qu’elle aimait tendrement. Ces nouveaux devoirs n’étaient point au-dessus de ses forces ; elle les accepta avec cette volonté consciencieuse, cette abnégation d’elle-même qu’elle mettait à toute chose, et trouva moyen de les remplir, sans abandonner le soin de son perfectionnement intellectuel et moral. Elle faisait, dans les diverses langues qui lui étaient familières, de fortes et sérieuses lectures, sans autre but que l’intérêt qu’elle y prenait. Elle écrivait, pour le seul plaisir de se rendre compte de ses idées et de formuler ses jugements ; car elle pensait que la gloire littéraire détourne les femmes de leur véritable mission. Un morceau sur le roman de Corinne, un autre sur lord Byron, ont été recueillis dans le volume non publié[1] qui contient ce qui reste d’elle. On y reconnaît déjà cette tendance à tout ramener aux idées de devoir et de moralité qui ont dominé sa vie. Un peu plus tard elle écrivit une sorte de petit poëme en prose, intitulé : Un mariage aux îles Sorlingues ; composition gracieuse et originale, qui donne la mesure de ce qu’elle aurait pu faire en s’abandonnant à son imagination.

Bientôt un nouveau chagrin vint l’arracher à ses occupations. La santé de Mme Guizot, depuis longtemps chancelante, déclina tout à coup, au point de donner les plus vives inquiétudes. Mlle Dillon consentit à se sé-

  1. Ce volume a été tiré seulement à soixante exemplaires.