Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 1.djvu/166

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gage qu’Ambiorix avait tenu au pied des remparts d’Atuatuca, lui montrent le roi des Éburons pour faire foi de leurs paroles, et finissent par lui dire qu’il est libre de se retirer en pleine sécurité avec ses troupes, leur seul but étant de se débarrasser des charges qu’entraîne le campement des Romains. Plus habile que ses malheureux collègues, Cicéron leur répond simplement : « Le peuple romain n’est pas dans l’habitude d’accepter des conditions d’un ennemi armé. Déposez les armes ; je serai votre protecteur auprès de César ! »

Celui-ci apprend enfin ce qui se passe. Il part de Samarobriva à la tête de quatre cents cavaliers, prend l’une des légions de Crassus, trouve sur son chemin la légion de Fabius, et marche rapidement en avant avec une armée d’environ sept mille hommes. Les Belges, levant le siége, courent à sa rencontre au nombre de soixante mille, se laissent entraîner sur un terrain défavorable et sont complétement défaits. Simulant la terreur et réduisant son camp à des proportions aussi exiguës que possible, César les avait attirés au pied des retranchements, pleins de mépris pour des ennemis qui, disaient-ils, n’osaient pas se montrer en rase campagne. Le même jour, il se rendit au camp de Cicéron, où, en présence des légionnaires survivants, il jura qu’il laisserait croître ses cheveux et sa barbe jusqu’au jour où il aurait tiré une vengeance éclatante de la révolte et de la perfidie des Éburons[1]. Il ne tint que trop ce serment terrible ! Passant une partie de l’hiver à Samarobriva, parce que la plupart des peuples de la Gaule lui inspiraient des inquiétudes, il n’attendit pas même le retour du printemps pour commencer la réalisation de ses desseins. Il donna à Labienus l’ordre de soumettre les Tréviriens, dont le roi Indutiomare, ami et instigateur d’Ambiorix, était tombé, victime de son imprudence, au pied des retranchements du camp établi chez les Rémois. Il se jeta lui-même sur les Nerviens, avec tant d’impétuosité qu’ils s’empressèrent d’accepter toutes les conditions du vainqueur et de lui fournir de nombreux otages. Il envahit ensuite le pays des Ménapiens, par trois endroits à la fois, parce qu’ils étaient les alliés d’Ambiorix et qu’ils pourraient[2], en cas de besoin, lui offrir une retraite derrière leurs forêts et leurs marécages ; il brûla leurs bourgs, enleva leur bétail, fit de nombreux prisonniers et ne leur accorda la paix que sous la condition expresse qu’ils refuseraient tout asile au roi des Éburons ou à quelqu’un des siens. Il se rendit alors aux bords du Rhin, traversa ce fleuve et envahit une seconde fois la Germanie, pour châtier les peuplades qui avaient envoyé des secours aux Tréviriens, et surtout pour fermer à Ambiorix toute retraite de ce côté[3]. Le tour du vaillant chef des Éburons allait venir.

Ambiorix, qui avait passé l’hiver à chercher partout des ennemis aux Romains, n’avait que très-imparfaitement réussi dans ses démarches. Quelques mouvements assez sérieux avaient eu lieu jusque dans la Gaule celtique ; mais la présence de César avait aisément dissipé ces troubles et découragé ces résistances. Les Ménapiens, les Tréviriens et les Nerviens étaient vaincus ; les Aduatiques étaient à la veille de l’être. Les Suèves qui, seuls de tous les Germains, avaient promis le secours de leurs armes, terrifiés par la brusque invasion de César, s’étaient enfuis en désordre à l’aspect des aigles romaines. Inquiet de l’avenir, désespéré peut-être, Ambiorix, accompagné de ses amis et de ses compagnons les plus dévoués, s’était retiré dans une maison entourée de bois et d’étangs, où il avait l’habitude de séjourner pendant les chaleurs de l’été. Ils y délibéraient sur les mesures à prendre dans l’intérêt de la nation, lorsqu’ils furent brusquement surpris par la cavalerie de César.

Repassant le Rhin, pour se rendre au pays des Éburons, le général romain s’était fait précéder de toute sa cavalerie, sous les ordres de L. Minutius Basilus. Celui-ci se jeta en avant et traversa la forêt des Ardennes avec tant d’impétuosité qu’il arriva sur le territoire des Ébu-

  1. Cette particularité est rapportée par Suétone. (Vit. Cœs., c. 67.)
  2. ERRATA ET RECTIFICATIONS DU Ier VOLUME : au lieu de : pourraient, lisez : pouvaient.
  3. Comm., l. VI, c. IX.