Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 2.djvu/202

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le torrent révolutionnaire. La Belgique fut envahie par les armées françaises ; l’aristocratie anéantie ; le clergé décimé ; De Béthune fut abandonné par les démocrates, qui s’allièrent franchement aux Français, et par les conservateurs qui prirent le parti de l’Autriche. Le 8 septembre 1793, il fut arrêté par les Français, puis relâché à Douai. Il se rendit à Calais, où la peur le prit à tel point qu’il voulut émigrer.

Du Fourny rendit compte de sa fuite dans la séance de la Société des Jacobins du 15 septembre 1793. « Béthune-Charost, homme dangereux par son hypocrisie, était, dit il, dans le département du Nord à aider de toutes ses forces le parti anti-révolutionnaire, qui dominait ; mais ayant perdu toute son influence, et craignant lui-même, il prit le parti de s’évader. Il monta un canot et s’éloigna du rivage. Bientôt on découvrit un cutter anglais vers lequel il pria le canotier de se diriger. — Mais c’est un ennemi, dit le canotier. — Eh ! point du tout, reprit M. de Béthune-Charost, c’est un ami, et nous serons bien reçus. Soyez tranquille ! — Le canotier, bien loin de suivre ce conseil, revint promptement vers la terre. Charost, voyant son dessein, lui tira un coup de pistolet, qui ne le toucha pas, et de suite un autre qui le blessa au bras. Voyant qu’il n’était pas mort, il voulut se tuer lui-même et se tira un coup à la tête ; mais il n’atteignit que son chapeau. Alors, voulant périr absolument, il se précipita dans la mer, où plongea, quoique blessé, le courageux canotier, qui l’en tira malgré lui et le ramena ainsi dans sa barque. »

Traduit devant le tribunal révolutionnaire, il fut condamné à mort, le 9 floréal an II, avec plusieurs autres victimes de la Terreur, comme coupable d’avoir conspiré contre la liberté, la sûreté et la souveraineté du peuple français. Le jugement fut immédiatement exécuté, et Charost passa par la guillotine avec le comte d’Estaing, la Tour Dupin et plusieurs autres personnages marquants.

Ch. Piot.

Biographie moderne, 3ee édition, t, I. p. 231. — Moniteur universel. — Borgnet, Histoire des Belges à la fin du XVIIIe siècle, t. I, p. 251 et s. — Manifeste de François II, du 27 mars 1792. — Archives du conseil privé. — Archives de la chancellerie des Pays-Bas, à Vienne. — Papiers du procès du prince de Béthune et des béthunistes, dans les Archives du conseil souverain de Brabant.

BETS (Jean), jurisconsulte, né à Malines dans la première moitié du xvie siècle, mort dans l’exil vers 1580. Il était fils de Josse Bets, ancien pensionnaire de la ville de Dordrecht et receveur des fiefs du marquisat de Berg-op-Zoom, et d’Anne Everaerts, de Malines, que nous tenons, jusqu’à preuve du contraire, pour la sœur du fameux poëte latin Jean Second. Il fut reçu docteur en droit à l’Université de Louvain et vint se fixer à Anvers pour y exercer sa profession. Ayant fait preuve d’un grand zèle pour la cause des réformés, ceux-ci le nommèrent leur avocat à gages, ce que les conseillers-inquisiteurs Parys et Sexagius ont traduit par pensionnaire du consistoire des Gueux. La nature de ces fonctions nous porte à voir en Bets l’auteur du vade-mecum des calvinistes de ce temps-là intitulé : Recueil des choses advenues en Anvers touchant le fait de la religion en l’an MDLXVI. Il avait épousé une demoiselle Nicolai, fille de l’ancien président du grand conseil de Malines, et devait à cette alliance d’avoir été reçu avocat près de ce tribunal suprême. Ce fut en cette dernière qualité qu’il protesta, avec plusieurs de ses collègues, contre la défense des prêches et assemblées promulguée par le grand conseil à la requête de la duchesse de Parme, et défendit, avec un plein succès, les prédicateurs hétérodoxes contre l’illégalité de cette défense. Le grand conseil, qu’il avait entraîné et gravement compromis par son éloquence, se vengea de lui, dès que la réaction eut triomphé, non-seulement en le destituant, mais en le bannissant à perpétuité sous peine de la hart et en le dépouillant de ses biens. Sa campagne, située à Bergh, près de Vilvorde, fut vendue, en 1568, pour la somme dérisoire de soixante-cinq livres d’Artois. Il avait eu pour amis et protecteurs le comte de Lalaing-Hochstraeten et les princes de Nassau, mais ces grands sei-