Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 2.djvu/366

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ne cessa de déployer depuis les premières années de son épiscopat lui concilièrent l’estime et l’affection de tous; ils lui firent gagner la confiance de la cour, au point que l’archiduchesse Isabelle le plaça, dès l’année 1626, au nombre de ses conseillers d’État. Peu de temps après, elle le fit nommer, par le Souverain Pontife Urbain VIII, délégat apostolique auprès des armées royales en Belgique. Elle l’honora aussi, en 1633, d’une mission diplomatique de la plus haute importance à la cour de Hollande; et, au moment de sa mort, le chargea de l’exécution de ses dernières volontés.

Boonen était d’un naturel doux, agréable, et l’on peut dire, sans exagération aucune, que la devise Vince in bono qu’il avait adoptée se vérifiait littéralement en lui. À cette aménité de caractère il joignait une grande fermeté qui ne se laissait ébranler par aucune considération lorsqu’il s’agissait de l’administration diocésaine ou de la défense des prérogatives archiépiscopales. Témoin la contestation qui surgit entre les archevêques de Malines et de Cambrai pour savoir à qui reviendrait l’honneur de faire les funérailles de l’archiduc Albert. L’archevêque de Malines sut maintenir les droits du primat de la Belgique, et célébra le service fuuèbre avec la plus grande pompe, les 11 et 12 mars 1622, en l’église des SS. Michel et Gudule, à Bruxelles. Sa générosité ne connaissait pas de bornes. Il était le père des pauvres, et, lorsque la patrie était en danger, il ne reculait devant aucun sacrifice. C’est ainsi, par exemple, qu’en 1629 il fit don aux armées qui défendaient la Belgique, d’une somme de huit mille francs, et, deux ans plus tard, d’une nouvelle somme de dix mille francs.

Malgré toutes ces belles qualités de l’esprit et du cœur, Boonen se laissa entraîner par le parti janséniste; il donna, pendant quelque temps, l’exemple de la résistance aux décrets de la cour de Rome, en facilitant d’abord l’impression et la distribution du fameux Augustinus, de Jansenius; et en empêchant ensuite par tous les moyens possibles la promulgation de la condamnation de ce livre. Les instances d’Urbain VIII et d’Innocent X pour obtenir de l’archevêque la publication des bulles condamnant la doctrine de l’Augustinus restèrent sans résultat. Boonen et son ami Antoine Triest, évêque de Gand, refusèrent avec opiniâtreté de se soumettre aux injonctions du Souverain Pontife. Poussé à bout par la désobéissance des deux prélats, Innocent X les somma, par bref du 18 novembre 1651, de se rendre à Rome afin de s’expliquer sur la conduite qu’ils avaient tenue, et les menaça de l’interdit et de la suspense, s’ils tardaient à obtempérer à son ordre. Alarmés par ce décret, ils s’excusèrent sur leur grand âge (Boonen avait près de quatre-vingts ans), leurs infirmités et sur les lois du pays qui ne leur permettaient pas de comparaître en justice hors de la Belgique. A la suite de ces observations ils furent autorisés, le 27 juillet 1652, à se faire représenter par des procureurs; mais ils imaginèrent alors un autre expédient pour ne pas avoir à répondre au tribunal du Souverain Pontife; ils se firent défendre, par un arrêt du Conseil de Brabant du 29 décembre suivant, de plaider leur cause à Rome sous peine de voir saisir tous leurs biens temporels. Lorsque Innocent X apprit ces tergiversations, il lança contre les deux évêques réfractaires une bulle par laquelle il les suspendait de toute juridiction et de toute fonction ecclésiastique. Elle arriva à Bruxelles le 6 mai 1653; elle fut affichée, le 11 du même mois, aux portes de l’église des SS. Michel et Gudule, et fut communiquée officiellement au chapitre métropolitain le 28 juin suivant, avec l’ordre d’interdire au prélat l’entrée de l’église cathédrale. L’archevêque se réfugia à Hingene, chez le comte d’Ursel, où son ami l’évêque de Gand vint bientôt le rejoindre. La soumission des deux prélats ne se fit pas attendre longtemps; le 5 août 1653, l’archevêque écrivit de Bruxelles au Souverain Pontife Innocent X, une lettre pour lui annoncer qu’il se soumettait aux décisions de la cour romaine, et qu’il les acceptait sans restriction; il lui demandait ensuite de se réconcilier avec le saint siége et d’obtenir l’absolution des censures en-