Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 2.djvu/455

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Voshem ou Van Vossem, mais il ne vécut avec elle que quelques années, car il mourut entre le 30 avril et le 25 août 1475, probablement le 6 mai 1475, à l’âge de quatre-vingt-quatre ans (et non pas en 1400, à l’âge de soixante-quinze ans, comme le dit Molanus). Il avait testé le 17 avril, par un acte passé dans sa maison même, devant le notaire Jean Amelen, et dont les termes attestent la parfaite entente qui régnait entre Thierri et Élisabeth. Le peintre choisit pour lieu de sa sépulture l’église du couvent des Frères Mineurs de Louvain, près de la tombe de sa première femme. Il laissa à Élisabeth van Vossem tous ses tableaux achevés et complets, tous les immeubles et créances dont il n’avait pas disposé, et certaines catégories de meubles. Élisabeth van Vossem continua à habiter l’habitation de son mari, auquel elle survécut de longues années;elle ne mourut que vers 1517.

Thierri avait eu de son premier mariage quatre enfants : deux fils, Thierri et Albert, et deux filles, Catherine et Gertrude. Celles-ci prirent l’habit dans le couvent de Dommele, près d’Eyndhoven et durent se contenter d’une redevance annuelle de dix muids de seigle et de quelques meubles. Les immeubles que Thierri avait acquis en commun avec sa première femme et les meubles dont il n’avait pas autrement disposé furent laissés par lui à ses fils, à qui il légua également la coupe d’argent qu’il avait héritée de ses parents, ses créances à charge de la ville de Louvain, les objets qui lui servaient à peindre et ses tableaux inachevés. Les filles de Thierri vivaient encore en 1516; ses fils, qui partagèrent ce qu’il leur avait laissé, le 22 juin 1476, furent l’un et l’autre peintres, et font plus loin le sujet d’un article biographique.

Dans la collection de portraits de peintres du graveur Cock, Thierri prend place entre Vander Weyden et Bernard van Orley. « L’artiste y a une physionomie sérieuse jusqu’à la tristesse. C’est le visage d’un homme qui vit de contemplation et de rêverie : des joues creuses, des pommettes saillantes, d’épais sourcis, de grands yeux, un nez très-fort et une bouche large. Son front prononcé est couvert d’une forêt de cheveux sans souplesse. Il porte une ample houppelande, dont les collets et les manches sont fourrés de pelleterie. » Le portrait de Thierri était jadis appendu dans l’église des Récollets de Louvain, avec celui de ses deux fils; la gravure de Cock en constitue sans doute une reproduction.

Lemaire des Belges place Thierri de Louvain à côté de Van Eyck et de Vander Goes. Marguerite d’Autriche rechercha ses œuvres, et Lampsonius, après l’avoir signalé à Guicciardin, lui consacra ces quatre vers, qu’on lit au bas de son portrait :

Theodoro Harlemio pictori.

Huc et ades,Theudore, tuam quoque Belgica semper
Laude nihil ficta tollet ad astra manum;
Ipsa tuis, rerum genitrix, expressa figuris

Te natura sibidum timet arte parem.

Ces éloges sont mérités. Digne élève de Van Eyck, qu’il connut sans doute dans sa jeunesse, Thierri marcha sur les traces de son glorieux maître. La beauté de son coloris, la finesse de sa touche, le soin avec lequel il traite les accessoires le rapprochent de Memling, mais ses personnages, aux formes grêles et allongées, sont loin des créations de Vander Weyden, si pleines de vigueur et d’expression, et des charmantes figures dues à Memling. Notre Bouts peut revendiquer l’honneur d’avoir inventé la peinture de paysages (claruit inventor in discribendo rure, dit Molanus), et, en effet, les plus vieux peintres de Harlem ne disaient-il pas, du temps de Van Mander, que la meilleure manière de retracer les champs avait été découverte dans leur ville. Ce fut donc Bouts qui ouvrit cette longue liste des paysagistes belges et hollandais, de ces hommes qui, par la création de leurs œuvres, inspirent ou entretiennent l’amour des beautés de la nature. Peu de peintres peuvent mieux être étudiés, car il nous est resté de lui quatre œuvres capitales, dont il est impossible de lui dénier la paternité.

On lui en attribue encore plusieurs autres et notamment : 1° Deux compositions