Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/306

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autres États ne permettaient pas qu’il résidat fréquemment ni longtemps en Allemagne : or les désordres croissants qu’y excitaient les disputes de religion, le voisinage redoutable des Turcs, demandaient la présence continuelle d’un prince qui eût en même temps assez de prudence pour apaiser les querelles théologiques et assez de valeur et de forces pour repousser les Ottomans : ces qualités étaient réunies dans Ferdinand, au jugement de toute la nation allemande. Charles indique une assemblée des électeurs à Cologne pour le 29 décembre. Il part, le 24 novembre, d’Augsbourg. A Spire il reçoit la nouvelle de la mort de l’archiduchesse Marguerite[1]. Il jette les yeux, pour la remplacer dans le gouvernement des Pays-Bas, sur sa sœur Marie : cette princesse, alors dans sa vingt-sixième année, était veuve de Louis II, roi de Hongrie, qui avait péri les armes à la main dans les plaines de Mohacs le 29 août 1526; elle avait pendant quelque temps gouverné la Hongrie en qualité de régente; depuis elle avait fixé sa résidence en Autriche. Il lui annonce, dans une longue lettre écrite de sa main[2], le choix qu’il a fait d’elle, l’invite à venir le trouver avec toute la hâte possible, et lui envoie, pour l’accompagner, le seigneur de Boussu, son sommelier de corps. Le 17 décembre il arrive avec Ferdinand à Cologne. Au jour fixé il réunit le collége électoral de l’Empire : tous les électeurs étaient présents, à l’exception du duc de Saxe, qui non-seulement n’avait pas voulu comparaître, mais encore avait envoyé son fils pour protester contre l’élection, qu’il prétendait être contraire à la bulle d’or et aux priviléges de l’Empire. Les autres électeurs passent outre, et, le 5 janvier 1531, à l’unanimité des suffrages, ils confèrent à Ferdinand la dignité de roi des Romains. Ferdinand et Charles se rendent à Aix-la-Chapelle, où le nouveau roi est couronné le 11; l’empereur, à cette occasion, fait plusieurs chevaliers avec l’épée de Charlemagne. Pendant ce temps, les princes protestants sur la convocation du duc de Saxe, s’assemblent à Smalkalde, petite ville de Franconie, et y signent entre eux un traité d’alliance qui prend le nom de ligue de Smalkalde; ils s’adressent aux rois de France et d’Angleterre, pour les intéresser à la défense de la liberté germanique.

Le 15 janvier Charles et Ferdinand se séparent, celui-ci pour retourner en Autriche, l’empereur pour aller visiter ses États des Pays-Bas. Charles entre à Maestricht le même jour; le 24 il arrive à Bruxelles. Le 2 mars il y assemble les états généraux; l’archevêque de Palerme, chef du conseil privé, donne, par son ordre, lecture à l’assemblée d’un exposé de tout ce qu’il a fait depuis 1522. Cette lecture finie, il prend lui-même la parole pour remercier les états des aides qu’ils lui ont accordées. L’audiencier, Me Laurent du Blioul, lui exprime, au nom de l’assemblée, les sentiments de la nation, reconnaissante des mesures qu’il a prises, des peines qu’il s’est données dans l’intérêt du pays; il lui promet que les états l’assisteront de corps et de biens jusqu’à la mort inclusivement. Avant de retourner chez eux, les représentants des provinces lui offrent une tapisserie représentant la bataille de Pavie et la prise du roi de France, chef d’œuvre à la fois d’art et d’industrie, sorti des ateliers renommés de Bruxelles. Il se montre sensible à cet hommage, qui lui rappelle un des plus glorieux événements de son règne.

La reine douairière de Hongrie, non sans bien des scrupules, avait accepté la charge qu’il lui destinait[3] : il va, le 14 mars, à sa rencontre jusqu’à Louvain; il visite, avec elle, avant de rentrer dans la capitale, Malines, Anvers, Gand et Termonde. Après la reddition de Florence au, mois d’août de l’année précédente, il en avait nommé duc Alexandre de Médicis : il trouve à Bruxelles (4 avril) un envoyé de ce jeune prince, le seigneur de Strozzi, chargé de recevoir en son nom l’investiture de ce titre et de l’autorité qui

  1. Elle était décédée à Malines dans la nuit du 30 novembre au 1er décembre.
  2. Analectes belgiques, p. 381.
  3. Elle écrivait, le 19 avril 1531, au roi Ferdinand, que l’Empereur lui avait mis la corde au col.