Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/318

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grande dans le camp[1]. Toutes ces circonstances déterminèrent l’empereur à reprendre le chemin de l’Italie : le 12 septembre, il commença son mouvement de retraite; le 25 il repassa le Var dans le même endroit où il l’avait franchi deux mois auparavant, mais cette fois c’était avec une armée découragée et considérablement réduite par les maladies et la misère. Aux Pays-Bas la campagne, qui avait commencé sous d’heureux auspices, ne s’était pas terminée aussi bien : après s’être emparés de Bray-sur-Somme, de Guise, de Bohain, les comtes de Nassau et du Rœulx avaient échoué devant Saint-Quentin et Péronne.

Charles, ayant mis garnison à Nice et distribué ses troupes dans les places du Piémont et de la Lombardie, prit le chemin de Gênes. Là, le 3 novembre, il prononça sur les prétentions à la succession du Monferrat que formaient plusieurs princes ses alliés; ce fut Frédéric de Gonzaga, duc de Mantoue, qu’il appela à la recueillir. Il nomma le marquis del Vasto capitaine général du Milanais en remplacement d’Antonio de Leyva, qui était mort à Aix le 10 septembre. Le 15 novembre il monta sur les galères d’Andrea Doria; après trois semaines de navigation, il arriva à Barcelone. L’impératrice l’attendait à Valladolid ; il alla l’y joindre. Il tint en cette ville les cortès de Castille, auxquelles il demanda un service extraordinaire; les procuradores, de leur côté, lui firent différentes demandes, dont la première était qu’il ne quittât plus l’Espagne et n’exposât plus sa personne à tant de risques et de périls qu’il l’avait fait jusque-là. Il convoqua ensuite les cortès générales des royaumes d’Aragon, de Valence et de Catalogne, qu’il ouvrit à Monzon, le 13 août 1537. Cette fois, dit un historien espagnol, les représentants des trois royaumes firent preuve de déférence et même de générosité envers leur souverain : l’Aragon lui accorda deux cent mille livres, Valence cent mille et la Catalogne trois cent mille[2].

Les désastres de l’armée impériale en Provence avaient inspiré à François Ier l’envie d’humilier son rival. Le 15 janvier 1537 il se rendit en grande pompe au parlement. L'avocat du roi, Jacques Cappel, prononça un plaidoyer où il s’efforça d’établir que l’empereur, vassal de la couronne pour la Flandre et l’Artois, s’était rendu coupable de félonie en faisant la guerre à son seigneur suzerain, et que les terres qu’il tenait en fief devaient en conséquence être confisquées sur lui. Le chancelier, ayant recueilli les voix, déclara que l’empereur serait cité à comparaître par un seul édit péremptoire, et que, par provision, tous ses vassaux et sujets, dans les terres qui d’ancienneté dépendaient de la couronne, seraient déliés de leur serment de fidélité. Après que le roi, par les traités de Madrid et de Cambrai, avait formellement renoncé à ses droits de souveraineté et de ressort sur l’Artois et la Flandre, c’était là assurément une démonstration non moins ridicule que vaine. Aussi François, qui n’en attendait aucun résultat, rassembla-t-il une armée considérable avec l’intention de porter la guerre dans ces provinces. Le 16 mars il entra dans l’Artois; il attaqua Hesdin, qui se rendit après une résistance vigoureuse; il prit Saint-Pol, Saint-Venant et d’autres places de peu d’importance. Là s’arrêtèrent ses conquêtes. Dès le 3 mai il fit mettre le feu à tous les endroits qu’il occupait, Hesdin et Saint-Pol exceptés, et licencia son armée. Les généraux belges reprirent alors Saint-Pol, et s’emparèrent de Montreuil. Dans le Piémont les armées françaises avaient d’abord subi des revers, mais elles venaient de forcer le Pas-de-Suse, et François se disposait à franchir les Alpes, où il avait été précédé du dauphin et du connétable de Montmorency.

Depuis que la guerre s’était rallumée entre Charles-Quint et François Ier, le pape, par ses légats auprès de ces deux monarques, n’avait cessé de faire tous ses efforts afin de les réconcilier. Les reines de France et de Hongrie avaient agi avec chaleur dans le même but. Grâce à leur influence, une trêve de dix mois fut signée à Bomy, près de Térouane, le

  1. Lettre de l’Empereur au comte Henri de Nassau du 4 septembre 1536 (Lanz, t. II, p. 248.)
  2. Lafuente, t. XII, p. 125.