Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/448

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tion, il fut résolu de s’en tenir à ce que l’empereur avait dit de sa bouche au légat[1].

Il était évident que des négociations ultérieures n’aboutiraient à rien, ni l’un ni l’autre des deux monarques rivaux n’étant disposé à faire des concessions, et chacun d’eux comptant sur le succès de ses armes pour dicter la loi à son adversaire. Cependant Jules III, de l’avis du sacré collége, voulut que les cardinaux de Saint-Georges et d’Imola continuassent leurs démarches en faveur de la paix; il les engagea même à se porter, précédés de leur croix, au milieu des armées belligérantes, afin de les séparer : invitation qui fit beaucoup rire Charles-Quint, lorsqu’on l’en instruisit[2]. Mais, ayant enfin reconnu que les choses n’étaient pas mûres pour le rétablissement de la concorde qui était l’objet de ses vœux, le pape rappela ses légats[3].

Après la conquête de Thérouaune, l’armée impériale avait marché à Hesdin. Charles-Quint venait de mettre à sa tête (22 juin 1553) le prince de Piémont, Emmanuel-Philibert, voulant, par le choix d’un chef de si haute naissance, faire cesser la rivalité de ses généraux, qui plus d’une fois avait été préjudiciable à son service. Emmanuel-Philibert ne comptait que vingt-cinq ans; mais déjà, dans la guerre contre les protestants d’Allemagne, il avait montré une bravoure et des talents militaires qui lui avaient gagné la confiance du soldat, et depuis toutes ses actions avaient confirmé la bonne opinion qu’il avait fait concevoir de lui. Hesdin fut promptement investi; la garnison, dès les premiers jours, se retira dans le château, dont les impériaux commencèrent immédiatement le siége. Le 18 juillet Robert de La Marck, duc de Bouillon, à qui la défense de la place avait été confiée, battit la chamade. Les termes de la capitulation venaient d’être arrêtés lorsqu’une explosion terrible, produite par un accident, coûta la vie à un certain nombre de Français et d’Impériaux. Ceux-ci, croyant à une violation de l’armistice, mirent le feu aux mines qu’ils avaient préparées et qui renversèrent une partie du château; alors ils y pénétrèrent, mettant à mort la plupart de ses défenseurs. En vain La Marck invoqua la capitulation; il fut fait prisonnier avec une foule d’autres gentilshommes. Horace Farnèse et beaucoup de Français de marque furent tués. Hesdin eut le sort de Thérouanne; on le rasa[4]. Les nouveaux succès des armes impériales causèrent dans tous les Pays-Bas une vive satisfaction : aussi Charles-Quint ayant, le 7 et le 13 août, appelé à Bruxelles des députés des états des provinces, pour leur demander les moyens d’entretenir ses troupes pendant le reste de l’année[5], cette demande fut-elle accordée par eux avec empressement.

L’attention de Charles en ce temps-là se partageait entre les opérations de son armée en France et les événements dont l’Allemagne et l’Angleterre étaient le théâtre. Albert de Brandebourg, après son retour dans la Germanie, se prévalant de la confirmation donnée par l’empereur aux traités qu’il avait conclus avec les évêques de Wurzbourg et de Bamberg, avait réclamé l’exécution de ces traités; les évêques avaient pris leur recours à la chambre impériale; celle-ci avait requis les princes leurs voisins de les secourir. Des conférences auxquelles, par ordre de l’empereur, assistèrent les ducs de Bavière, de Wurtemberg et de Clèves, se tinrent à Heidelberg, pour tâcher de concilier les parties; elles n’eurent pas de résultat : les évêques offraient d’assez grosses sommes, mais Albert exigeait la pleine et entière exécution des traités. La chambre impériale, par un nouveau décret, ordonna à l’électeur de

  1. Dépêche citée du 12 juin.
  2. Il fit dire au légat, par Granvelle, que c’était assez que ce langage eût été tenu à Rome en la chambre du consistoire : Et circa l’andar con le croci tra li esserciti, che bastava ce fusse stato dello a Roma, nella camera del concistoro. (Dépêche du cardinal d’Imola au pape du 29 août : reg. cité, fol. 198.)
  3. Nunziatura di Fiandra, vol. Ier, fol. 110, 114, 140, 151, 198, 328.
       Le cardinal d’Imola quitta Bruxelles le 8 octobre; le cardinal de Saint-Gcorges prit congé du roi de France, à Villers-Cotterets, le 10.
  4. Sismondi, t. XII, p. 249. — Al. Henne, t. X, pp. 48-53.
  5. Arch. du royaume : reg. Propositions aux états généraux, 1535-1563, fol. 180.