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que l’empereur l’autorisât à venir le trouver. Le cardinal alors jugea à propos de retourner à Dillingen, où le cardinal del Monte, secrétaire d’État de Jules III, ne tarda pas à lui faire savoir que l’intérêt de l’Église conseillait de se conformer aux désirs de l’empereur. Ce fut seulement le 22 décembre, quand le mariage de son fils avec la reine d’Angleterre n’était plus douteux, que Charles-Quint invita le légat à se rendre à Bruxelles[1].

Pole arriva dans cette capitale le 25 janvier. La goutte avait beaucoup tourmenté Charles-Quint depuis le commencement de l’hiver; cinq semaines durant il avait été obligé de garder le lit, sans pouvoir s’occuper des affaires publiques; ceux qu’il’entouraient avaient même conçu des craintes pour sa vie : mais en ce moment sa santé était assez bonne; il donna audience au cardinal le 2 février. Pole n’avait pas seulement été revêtu par le pape du caractère de son légat auprès de la reine d’Angleterre, mais Jules III lui avait encore donné la mission de reprendre, avec l’empereur et le roi de France, les négociations pour la paix dans lesquelles les cardinaux d’Imola et de Saint-Georges avaient échoué. Ce sujet fut l’un de ceux dont il entretint l’empereur. Charles lui dit qu’il était prêt à faire la paix à des conditions qui la rendissent ferme et stable, et que, si l’on pouvait s’en promettre le repos de la chrétienté, il montrerait qu’il avait, plus à cœur le bien public que les injures qui lui avaient été faites. Pole l’engagea à mettre en avant des moyens d’accord : il répondit que c’était à l’agresseur à les proposer, en restituant ce dont il s’était emparé contre toute justice. Le légat conféra plusieurs fois sur le même sujet avec l’évêque d’Arras; il visita la reine de Hongrie, pour laquelle il était porteur d’un bref du pape, et lui exprima la confiance, où était le souverain pontife, qu’elle favoriserait l’œuvre de la paix, dont les peuples des Pays-Bas éprouvaient particulièrement le besoin; il eut, le 19 février, une seconde audience de l’empereur. Ni de ce monarque, ni de son premier ministre, ni de la reine gouvernante, il ne put rien obtenir de plus que ce qui lui avait été déclaré précédemment[2]. Alors il se décida à partir pour la France, où Henri II le reçut avec de grands honneurs : mais ce roi ne se montra pas plus enclin que l’empereur à rabattre quoi que ce fût de ses prétentions. C’était au sort des armes que l’un et l’autre ils entendaient remettre la décision de leurs querelles.

Le 1er mars 1554 Charles-Quint assembla les états généraux en son palais; il entra dans la galerie où ils étaient réunis, s’appuyant sur un bâton; la reine douairière de Hongrie prit place à son côté[3]. La proposition fut lue par le président du conseil d’État, Jean de Saint-Mauris. L’empereur remerciait d’abord les représentants de ses provinces des Pays-Bas du « bon devoir et singulière affection » qu’ils avaient toujours montré en ce qui concernait la conservation et le bien de leur patrie, et particulièrement de la grande volonté et promptitude avec laquelle, depuis leur dernière assemblée, ils avaient fourni les sommes qui leur avaient été demandées. Il leur rappelait ensuite que, dans la campagne précédente, malgré son indisposition, il avait voulu se trouver en personne à son armée, pour s’employer, comme bon prince, à leur défense, leur faisant remarquer que le résultat avait répondu à ses efforts, puisqu’il avait obligé les Français de se retirer avec dommage et honte. Il leur signalait les pratiques auxquelles s’était livré le roi de France, quand l’hiver était venu interrompre les hostilités, afin de semer des troubles dans la Germanie, en Italie et surtout en Angleterre, où il s’était uni aux conspirateurs dansle but de détrôner la reine. Il leur annonçait qu’informé des préparatifs que ce roifaisait pour assaillir de nouveau les Pays-Bas, non-seulement par terre, mais encore par mer, il avait déjà donné l’ordre que des navires de guerre fussent promptement équipés; que, de l’avis des gouverneurs des provinces ainsi que des

  1. La Bibliothèque des princes Corsini à Rome, Bruxelles, 1869, in-8o, pp. 10-22.
  2. Ibid., pp. 22-29.
  3. Bulletins de la Commission royale d’histoire, 2me série, t. V, p. 76.