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EN CANOT DE PAPIER.

main, jusqu’au phare où le capitaine Hatzel me reçut avec une grande cordialité ; il prit note sur son journal de la date et des circonstances de mon arrivée ; il me conduisit dans une chambre confortable, bien chauffée, et égayée par les sourires de sa femme, ménagère modèle. Chaque chose indiquait l’ordre et la propreté, tant à l’intérieur de cette maison que dans la tour du phare. La plus blanche des nappes sè couvrit d’un repas bien préparé, à la fin duquel le père, la mère et les deux fils, avec l’étranger qui était leur hôte, remercièrent le Dispensateur de tous les biens de sa miséricorde.

En allant me joindre au gardien en chef du phare, qui faisait le quart de nuit, je partageai aussi l’enthousiasme de l’excellent homme pour « son admirable feu blanc et fixe », dont les rayons versaient sur les eaux d’alentour une brillante lumière qui charmait le cœur des marins en leur disant même à vingt milles de distance : « Voilà l’île Body, tenez-vous au large. » Qu’il était beau de se promener sur la galerie du phare et de voir le ciel ! de voir à l’est l’infini de l’Océan, à l’ouest les eaux du Grand-Sound et les côtes marécageuses qui s’étendaient à plusieurs milles de distance ! Au-dessous de moi, j’entendais le doux gloussement de l’oie du nord (anser hyperborus) qui, ayant abandonné son nid sur les terrains désolés de l’Amérique polaire, venait maintenant prendre sa pâture dans ses quartiers d’hiver, sur les étangs salés et peu profonds, tandis que le murmure des vagues se perdait sur le rivage. Au-dessus, le ciel se parsemait d’étoiles dont les merveilles resplendissantes semblaient presque m’appartenir.