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EN CANOT DE PAPIER.

inondées, du grand cours d’eau. Au second plan, sur un sol sablonneux, s’élevaient des forêts de pins jaunes d’une grandeur si extraordinaire qu’ils cachaient tout l’horizon. De petites éminences et des grèves de sable blanc de peu d’étendue m’offraient d’excellents points de campement.

S’il vous arrive de demander à un cracker des marais Okefenokee pourquoi il s’est établi dans un pays aussi abandonné et où il n’a pour compagnons que quelques bestiaux et des porcs, avec des moustiques, des mouches, de la vermine, des alligators et des hiboux qui rendent les nuits lugubres, il ne manquera pas de vous dire : « Oui, étranger, mais le bois et l’eau en si grande abondance dans les marais sont des avantages qu’on ne trouve pas partout. »

Tandis que je descendais rapidement le noir courant, je cherchais du regard dans l’épaisseur des bois quelque hutte de colon, mais je ne pus découvrir nulle part, ce jour-là, aucune clairière, pas le plus petit nuage de fumée s’élevant d’une cheminée pour m’indiquer la présence de l’homme civilise. J’étais seul dans ces vastes solitudes, que traverse rapidement, mais sans bruit, la rivière jusqu’à la mer. Thoreau aimait le marais, comme le font tous les amants de la nature ; car nulle part ailleurs elle n’a déployé aussi généreusement la puissance de sa végétation et la variété infinie de ses merveilleuses richesses botaniques. Dans ces lieux, les oiseaux se réunissaient en troupes, fuyant la chaleur et les hauts plateaux sablonneux pour venir chercher de l’eau pure, la fraîcheur des ombrages et une multitude