Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/143

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les emploi, classait les ambitions, et offrait un but mondain à la ferveur de toute piété mystique. Et le premier ministre du roi, celui qui avait été appelé à conduire en quelque sorte la croisade entreprise contre la bourgeoisie, n’était-ce pas un homme de bourse, M. de Villèle ? M. de Villèle, en qui tout était bourgeois : les manières, le langage, les sentiments, les instincts, les aptitudes ?

Le parti féodal et religieux portait donc en lui-même les causes de sa ruine. Il parlait de fonder le règne des croyances, et il ne sacrifiait qu’aux intérêts ; il s’échauffait contre l’esprit moderne, et il en subissait l’empire. De telles contradictions sont le suicide des partis.

D’ailleurs, et indépendamment de sa force morale, la bourgeoisie possédait, par l’institution de la garde nationale, une force matérielle parfaitement organisée. Exclue du parlement, il était tout naturel qu’elle choisît pour arène la place publique et fît avec des menaces ce qu’elle ne pouvait faire avec des lois. Une revue imprudente lui fournit l’occasion désirée. Du milieu de ses rangs armés sortirent un jour des cris de haine qui retentirent aux oreilles de Charles X lui-même. Au fond, cette démonstration était peu sérieuse, peu révolutionnaire, du moins. La bourgeoisie avait trop à perdre dans un ébranlement social, pour en courir volontairement les risques. La désarmer était non-seulement une puérilité, mais une folie. Dans un pays monarchique, le