Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/192

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grandeur. L’alliance conclue par Charles X entre la monarchie et la religion, n’élevait plus le trône : aux yeux du peuple, elle rapetissait Dieu.

Voilà dans quel milieu la royauté se trouvait quand elle résolut de briser toutes les résistances légales. Violer la charte, le roi n’y songeait même pas. Non qu’il la trouvât bonne, mais il l’avait jurée. Or, il était à la fois gentilhomme et dévot[1]. Entre l’accomplissement de ses désirs et le respect de sa parole, l’article 44 lui semblait offrir une conciliation possible. User du bénéfice de cet article devint bientôt sa plus ardente préoccupation, et mille circonstances la dénoncèrent sans en définir exactement l’objet.

Alors, parmi les royalistes, les plus clairvoyants se montrèrent inquiets. M. de Villèle fit un voyage à Paris pour détourner de la royauté, s’il en était temps encore, le coup qu’il prévoyait. De son côté, M. Beugnot disait : « La monarchie va sombrer sous voile comme un vaisseau tout armé. » Chaque jour, et de toutes parts, on assiégeait les ministres pour avoir le mot de cette redoutable énigme ; mais ils s’enveloppaient de mystère, et le président du conseil rassurait les membres du corps diplomatique, lorsque, tremblant pour la paix du monde, ils venaient l’interroger sur les choses du lendemain. Instruit de tout ce qu’il y avait d’extraordinaire à Paris, dans la physionomie de la cour, M. de

  1. « Charles X, Voyant son trône et la charte menacés, a voulu défendre l’un et l’autre. On ne saurait nier aujourd’hui que l’un et l’autre ne fussent en danger, puisque la charte et le trône ont été renversé à la fois. »
    (Note manuscrite de M. de Polignac.)