Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/197

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qui finit par lui dire : « Autant valait réduire yotre ordonnance à quatre lignes, et régler que les députés seraient élus par les préfets des départements », paroles dont M. de Peyronnet se montra irrité.

On passa ensuite à l’examen des forces dont on pouvait disposer. Sous ce rapport plusieurs ministres n’étaient pas sans avoir conçu de vives inquiétudes. M. de Polignac, au départ de M. de Bourmont, avait ajouté à ses fonctions de président du conseil celle de ministre de la guerre. Double fardeau, bien lourd pour une tête aussi fragile ! C’est en vain qu’en partant, M. de Bourmont avait recommandé à son collègue de ne rien tenter avant son retour : M. de Polignac avait en lui-même une confiance sans bornes. « Sur combien d’hommes vous est-il permis de compter, à Paris, lui demanda M. d’Haussez ? En avez-vous au moins 28 ou 30 mille ? — Mieux que cela, répondit « M. de Polignac, j’en ai 42 mille. » Et roulant un papier qu’il tenait à la main, il le jeta au baron d’Haussez, placé de l’autre côté de la table. —  « Eh quoi ! s’écria le ministre de la marine, je ne vois ici que 15 mille hommes ! 15 mille hommes sur le papier ! Mais cela veut dire que, pour combattre, il y en aurait à peine 7 ou 8 mille ! Et les 29 mille qui complètent votre chiffre, ou sont-ils ? » M. de Polignac assura qu’ils étaient répandus autour de Paris, et qu’au bout de dix heures, s’il en était besoin, ils seraient rassemblés dans la capitale.

Ce dialogue fit sur les ministres une impression profonde. Ils allaient jouer les yeux fermés une partie formidable.