Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/253

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main sur vous, je lui fais tomber le poignet d’un d’un coup de sabre. »

M. Arago est conduit auprès du général en chef. Mais, avant qu’il eût ouvert la bouche, Marmont lui criait d’une voix brève et en étendant le bras :

« Ne me proposez rien qui me déshonore. » — « Ce que je viens vous proposer vous honorerait, au contraire. Je ne vous demande pas de tourner votre épée contre Charles X ; mais refusez tout commandement, et partez à l’instant même pour Saint-Cloud. — Comment ! que j’abandonne le poste où la confiance du roi m’a placé ! que je lâche pied, moi soldat, devant des bourgeois ameutés ! que je fasse dire à l’Europe que nos braves troupes ont reculé devant une populace armée de pierres et de bâtons ! C’est impossible ! c’est impossible ! Vous connaissez mes sentiments. Vous savez si je les ai approuvées, ces ordonnances maudites ! Mais une horrible fatalité pèse sur moi il faut que mon destin s’accomplisse. — Vous pouvez combattre cette fatalité. Un moyen vous reste pour effacer dans la mémoire des Parisiens les souvenirs de l’invasion… Partez, partez sans retard ! »

En ce moment, un homme s’élance dans la salle d’attente, Il est en veste et porte une casquette de loutre. A l’aspect de cet inconnu, on se trouble, on veut l’arrêter, et c’est à peine s’il a le temps d’abattre sa casquette d’un revers de main, en s’écriant : « Vous ne me reconnaissez donc pas ! je suis l’aide-de-camp du général Quinsonnas. J’ai coupé mes moustaches pour pouvoir arriver jus-