Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/280

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calme et se retira. Furieux d’une résistance qui les laissait livrés au péril, les deux négociateurs monarchiques proposèrent au maréchal d’arrêter les ministres, coupables d’avoir risqué, pour la cause du roi, la tbrtune des serviteurs de la royauté. M. de Glandevez offrit son épée. Le duc de Raguse hésita ; M. de Peyronnet reparut. Et tentant un dernier effort, MM. de Sémonville et d’Argout partirent pour Saint-Cloud.

Au moment où leur voiture entrait dans la grande allée du jardin des Tuileries, un homme s’élança devant les chevaux, montrant Saint-Cloud d’une main, et de l’autre, une voiture qui suivait. C’était celle de M. de Polignac, et l’homme qui, avec cette éloquence muette, engageait M. de Sémonville à se hâter, était un de ceux qu’il voulait un instant auparavant faire arrêter, M. de Peyronnet[1].

Une grave et récente nouvelle avait jeté la consternation dans ce château de Saint-Cloud vers lequel se dirigeaient les ministres : on y avait appris de grand matin, que la ville de Versailles était en pleine

  1. « Ce ne furent ni les sommations du duc de Raguse, ni celles de M. de Sémonville qui donnèrent lieu, comme on l’a supposé, au départ des ministres pour Saint-Cloud. Et cela, par une raison toute simple, c’est qu’ils n’en firent aucune, n’ayant aucune qualité pour leur en adresser. Le départ des ministres fut occasionné par une lettre de Charles X, qui leur faisait connaitre son intention de réunir son conseil le lendemain matin. Ma voiture m’attendait dans la cour des Tuileries long-temps avant l’arrivée de M. de Sémonville.

    La déposition de M. de Sémonville à la chambre des pairs n’est qu’une scène à effet, composée dans le silence du cabinet. Je déclare ignorer la majeure partie des choses rapportées par lui et où il me fait agir comme acteur ; mais chacun a sa manie : celle de M. de Sémonville est de mettre toujours quelque drapeau en scène. »

    (Note manuscrite de M. de Polignac.)