Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/281

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insurrection. Le voisinage de Versailles donnait à cet événement un caractère formidable. Encore quelques heures, et la révolte, peut-être, viendrait assiéger la royauté jusque dans son palais. Il était urgent de déployer de la vigueur. Deux compagnies de gardes-du-corps se trouvaient dans la cour du château : on pouvait les faire marcher sur Versailles ; mais pour conduire cette aventureuse expédition, aucun capitaine des gardes ne se présentait. D’un autre côté, faire passer sous les ordres de quelque général de l’empire un corps auquel des gentilshommes de la plus haute noblesse se croyaient seuls dignes de commander, c’était une bien rude atteinte aux prérogatives de cour. Dans l’esprit de Charles X une pareille dérogation à l’étiquette avait presque l’importance d’une bataille perdue. Mais un moment vient où les choses reprennent invinciblement leur niveau naturel et où la logique l’emporte sur les petits arrangements de la vanité humaine. Le général Vincent s’offrit à prendre le commandement des gardes, et dans la circonstance, s’offrir, c’était s’imposer. Ses services furent acceptés par le dauphin Charles X dissimula son mécontentement ; et le général partit pour Versailles à la tête des deux compagnies de gardes-du-corps soutenues par deux ou trois cents gendarmes. Parvenu au dernier détour de la route, il fit faire halte à sa troupe, et s’avançant tout seul vers la grille, il envoya demander une entrevue aux autorités de la ville. Bientôt il vit venir à lui le secrétaire-général et le maire, suivis d’un nombreux détachement de gardes nationaux. Ce groupe paraissait fort animé,