Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/320

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majesté me demande… — Oui, c’est cela même, interrompit le roi, et, par un mouvement involontaire de défiance, il ajouta : « Heureux encore qu’ils ne m’imposent que vous ! »

M. de Polignac parut dans la salle où MM. de Vitrolles, de Sémonville et d’Argout attendaient une décision. M. de Polignac ne voulait admettre auprès du roi que M. de Vitrolles ; mais, s’avançant vers le président du conseil, M. de Sémonville lui prit les mains affectueusement, et il lui disait : « Vous savez, mon cher prince, quelle est en vous notre confiance, mais les circonstances sont graves ; il faut absolument que nous parlions à Charles X. » M. de Vitrolles appuya cette prière, et les trois négociateurs furent introduits auprès du roi. Il y avait dans tout son maintien une noblesse résignée ; mais son visage trahissait cette amertume intérieure que désavoue inutilement la vanité humaine. « Messieurs, leur dit-il, vous l’avez voulu ; partez ! allez dire aux Parisiens que le roi révoque les ordonnances ; mais, je vous le déclare, je crois ceci fatal aux intérêts de la France et de la monarchie. »

Les trois négociateurs partirent en calèche pour Paris. Le comte de Girardin les suivait à cheval. Sur la route, M. de Sémonville criait : « Mes amis, les ministres sont à bas ; » et il accompagnait ces mots de jurements grossiers, flatteries que, du haut de sa calèche, un grand seigneur croyait adresser au peuple. Ils gagnèrent de la sorte la place de Grève. Dans le trajet, il était arrivé à M. de Vitrolles de sentir ses mains pressées affectueusement par des