Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/345

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tardera pas à s’associer pleinement aux vœux de la nation. »

Cette note était sans doute destinée à faire connaître aux partisans du duc d’Orléans la marche qu’ils avaient à suivre. Ils devaient lui offrir la couronne, en ayant l’air de lui faire violence, et sous prétexte que sa présence à Paris était nécessaire pour le maintien de l’ordre. Mais on leur faisait savoir d’avance qu’ils n’auraient pas à courir le double péril de l’offre et du refus.

M. Thiers avait reparu à l’hôtel Laffitte. En apprenant qu’on l’avait devancé à Neuilly, il se plaignit avec dépit d’avoir été oublié. « Mais il est tout simple qu’on oublie les absents, lui dit Béranger d’une voix doucement moqueuse. Au reste, qui vous retient ? » M. Thiers fit certifier sa mission par M. Sébastiani et partit, accompagné de M. Scheffer. Il allait au-devant de la fortune.

Arrivés au château de Neuilly, les deux négociateurs furent reçus par la duchesse d’Orléans. Son mari était absent. Pendant que M. Thiers expliquait l’objet du message, un grand trouble parut sur le visage austère de la duchesse ; et, quand elle apprit qu’il s’agissait de faire passer dans sa maison une couronne arrachée à un vieillard qui s’était toujours montré parent fidèle et ami généreux : « Monsieur, dit-elle en s’adressant à M. Scheffer avec une émotion pleine de grandeur, comment avez-vous pu vous charger d’une semblable mission ? Que Monsieur l’ait osé, je le conçois : il nous connaît peu, mais vous qui avez été admis auprès de nous, qui avez pu nous apprécier… ah ! nous ne vous par-