Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/438

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stances, votre place n’est pas au lit, mais là où se confectionnent les rations », et il exposa l’ordre qu’il avait reçu. Au mot fusiller, le préfet sauta rapidement à bas de son lit, en promettant qu’avant une heure les voitures seraient en marche pour Rambouillet. « J’attendrai pour vérifier le fait, dit l’aide-de-camp d’un ton sévère. » La physionomie de la révolution de juillet est tout entière en de semblables scènes, et rien ne montre mieux quel parti aurait pu tirer des forces nées de l’insurrection un homme capable de les diriger. Il faisait grand jour quand l’aide-de-camp du général Pajol le rejoignit à Coignères. La nuit n’avait amené aucun accident fâcheux. Parmi les hommes de l’expédition, beaucoup, accablés de fatigue, s’étaient laissé tomber dans les champs de blé qui bordaient la route et s’y étaient, endormis.

De tels ennemis étaient à coup sûr peu formidables. Et pourtant, la seule nouvelle de leur voisinage mit tout en rumeur au château de Rambouillet. On y délibérait dans d’inexprimables angoisses. Les uns voulaient qu’on y attendit de pied ferme tous les hasards. Ne pouvait-on espérer de prochains renforts ? Fallait-il jouer sur une panique les destinées de la monarchie ? Une retraite sur la Loire serait toujours possible ; et la Vendée, en désespoir de cause, ne gardait-elle pas à la royauté poursuivie des refuges et des vengeurs ? D’autres conseillaient une prompte fuite. Ils représentaient que l’insurrection gagnait au loin les campagnes ; que les Parisiens étaient peut-être au nombre de 80,000 hommes ; qu’une fois la retraite coupée, il n’y aurait au-