Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/12

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loignement je ne sais quel caractère merveilleux ; et le peuple de France revivait aux yeux de l’Europe étonnée, dans les gigantesques proportions que lui avaient données la République, et, après la République, l’Empire.

En Angleterre l’émotion fut profonde. Les journaux y célébrèrent à l’envi l’héroïsme des Parisiens, et de toutes parts on y ouvrit des souscriptions en faveur des blessés. Ces démonstrations n’étaient sincères et désintéressées que de la part des radicaux. Les whigs éclatèrent en joyeux transports, parce que, dans leurs espérances, ils avaient toujours associé au mouvement qui les porterait aux affaires, le triomphe du libéralisme français. Mais les tories, chose étrange en apparence, les tories eux-mêmes se montrèrent insensibles au malheur qui frappait une famille royale, et le ministère Wellington sembla sourire à une crise qui, pourtant, devait entraîner sa chute.

C’est qu’il y avait ici, pour les tories, une question plus haute que toutes les questions de parti : celle de la suprématie de l’Angleterre en Europe. L’aristocratie anglaise, comme toutes les aristocraties, apporte dans l’accomplissement de ses desseins beaucoup de clairvoyance et de suite. Elle savait que, sous Charles X, il avait été question de livrer aux Français la rive gauche du Rhin, et aux Russes Constantinople. Elle savait aussi que le duc d’Orléans était anglais par goût et par inclination, comme il l’avait écrit lui-même[1]

  1. Le 28 juillet 1804, le duc d’Orléans écrivait, de Twikenam, à l’évêque