Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/209

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sité était l’interprétation vivante des chartes ; qu’une société ne pouvant jamais se commander à elle-même le suicide, il était des crises où il la fallait bouleverser, sous peine de la détruire ; que l’article 14, par conséquent, régissait le monde, et se trouvait écrit dans la nature des choses, lorsqu’il ne l’était pas dans les constitutions ; que les peuples, après tout, avaient leur article 14 comme les rois, les révolutions n’étant que la contre-partie des coups d’état. Il n’y avait donc qu’une question à examiner : les ordonnances avaient-elles été rédigées sous la loi de cette nécessité souveraine ? Ici le doute était impossible. La dynastie des Bourbons aînés aurait pu se maintenir, sans doute, par des concessions habilement ménagées, si la source de ses périls n’avait été qu’à la surface de la société, si elle avait eu seulement à lutter contre l’hostilité des libéraux du parlement, ou l’orgueil irrité des électeurs, si elle n’avait eu à se défendre que contre quelques trames obscures, si elle n’avait été forcée pour son salut qu’à faire un peu plus large la part de la liberté. Mais non : la dynastie de Charles X était fille de l’invasion. Voilà ce qui l’environnait d’abîmes, voilà ce qui faisait pulluler autour d’elle des ennemis indomptables, et ne lui laissait d’alternative qu’entre le despotisme et le suicide. On ne pouvait nier que le lendemain de la révolution, la bourgeoisie n’eût tout-à-coup changé d’allures, passant du culte de la liberté à celui du pouvoir, entourant le trône avec amour et repoussant avec une sombre vigilance toutes les hardiesses de l’esprit. Ce n’était donc ni l’ordre ancien, ni le principe monarchique, ni les conséquen-