Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/255

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formellement la couronne offerte à son fils. Il motivait son refus sur son peu d’ambition, sur la nécessité de conserver la paix.

Toute la partie saine de la nation française fut consternée. Les Anglais furent transportés de joie.

Pour comprendre combien le refus de Louis-Philippe dût être agréable à l’Angleterre, il suffit de considérer quelle était alors la situation de ce royaume. Ses finances étaient si obérées, qu’une suppression de deux cent dix places dans la trésorerie avait été résolue, et que, dans ce pays tout monarchique, on se préparait à faire subir à la liste civile une réduction offensante pour la royauté. La misère des classes ouvrières avait atteint cette limite funeste où commence le désespoir. La récolte des pommes de terre venait de manquer en Irlande, où le peuple ne mange pas de pain, et les propriétaires tremblaient au sein de leur opulence oppressive ; car on ne voyait plus dans les campagnes qu’une errante et pâle multitude de pauvres en armes. Puis, O’Connell s’était levé, du milieu de tant de ruines, orateur violent, cœur indomptable et orageux, homme tout puissant par l’excès de ses haines, par l’excès de son audace, demi-dieu d’un peuple d’affamés. « Le rappel de l’union ! » avait-il crié, d’une voix qui faisait tressaillir tous les Irlandais et ce cri semblait présager les horreurs d’une espèce de guerre servile. A cette agitation d’esclaves à jamais irrités répondait, en Angleterre, celle des partis se débattant dans une mêlée furieuse. Le ministère de lord Wellington, renversé, triomphait déjà de l’épuisement convul-