Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/258

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cident, la Pologne invoquait le génie tutélaire de ce peuple français qui jadis était allé sauver les chrétien de Terre Sainte ; qui avait rempli de la valeur de ses chevaliers toute l’histoire du moyen âge ; qui, à la veille d’une révolution profonde et mémorable, avait envoyé les plus nobles d’entre ses enfants au secours de la jeune liberté du Nouveau Monde ; qui, sur la fin du 18e siècle, avait, pour propager une doctrine de fraternité, inondé de son sang les champs de bataille et les échafauds ; qui, sous l’Empire, enfin, s’était consumé en efforts mortels, pour ouvrir aux nations les plus faibles les libres routes de l’Océan. Peuple d’ardents soldats et d’aventuriers généreux ! Mais, par un bizarre concours de fatalités historiques, sur ces soldats et ces aventuriers pesait un gouvernement de froids calculateurs. Dans le moment même ou, des bords de la Vistule, tous les bras étaient tendus vers nous, le cabinet du Palais-Royal laissait mettre à sa réconciliation avec la cour de Russie les conditions les plus humiliantes et les plus dures.

Dans sa haine pour la maison d’Orléans, l’empereur Nicolas avait envoyé un ordre de rappel à son ambassadeur en France, M. Pozzo di Borgo. Cette nouvelle consterna le château. Mais on y était instruit de l’estime et de l’affection que l’empereur de Russie portait au duc de Mortemart. Nul doute que la paix ne fût obtenue si on employait un semblable intermédiaire. Nicolas le désignait comme le seul qu’il fut disposé à recevoir favorablement. On sonda les dispositions du duc de Mortemart. Il ne voulait point partir pour St.-Pétersbourg, et on