Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/278

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Puis venaient, à côté d’un petit nombre de républicains-démocrates prenant déjà pour devise l’abolition du prolétariat, les républicains-bourgeois, logiciens du libéralisme, et qui se contentaient de crier à leurs amis de la veille : l’œuvre de destruction n’est pas complète ; pourquoi la royauté debout quand tout le reste est par terre ? Enfin, et pour que rien ne manquât à cette guerre pleine de bruit et de ténèbres, on avait vu descendre dans la lice des hommes qui invoquaient l’Empire au nom de la liberté.

Dans ce vaste tourbillon où roulaient les intérêts et les idées, il était difficile que la religion ne fût pas emportée, elle aussi. Des réformes religieuses étaient tentées : les unes futiles, les autres sérieuses. Un prêtre, nommé Chatel, s’était avisé d’introduire la langue usuelle dans la liturgie, schisme sans portée, sans intelligence, parce qu’il dépouillait de tout mystère, c’est-à-dire de toute poésie, la prière qui, du fond des âmes simples, monte jusqu’à Dieu.

Mais, parmi les réformateurs religieux de l’époque, il y en avait un qui remplissait le siècle de son nom. Tandis que, dans le Globe, les Saint-Simoniens parlaient de régénérer la société, M. de Lamennais, avec bien plus d’autorité, de science, et non moins d’éclat, parlait, dans l’Avenir, de régénérer l’Église. Déplorant les écarts de l’illustre Bossuet, et attaquant dans le Gallicanisme une doctrine qui n’avait jamais donné qu’à la tyrannie des rois ce qu’elle prétendait enlever à la haute tutelle des papes, M. de Lamennais et son disciple l’abbé Lacordaire demandaient que l’Église devint indépendante de l’État ; que l’influence du pouvoir cessât de peser sur