Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/433

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et formidable ? Il y avait de la naïveté, après tout, à s’imaginer que les Belges devinssent Anglais, parce qu’un prince anglais leur avait été proposé pour roi ; comme si les intérêts des peuples, leurs affections, leur existence matérielle et morale, pouvaient dépendre du lieu où il avait plu à la fortune de placer la patrie de leurs souverains ! Quant à la Pologne, son courage était admirable sans doute et ses malheurs étaient dignes d’une éternelle pitié ; mais enfin, comment lui venir en aide ? Séparée de nous par toute la largeur du continent, par quatre cents lieues, sa position géographique nous condamnait à des douleurs stériles, à des vœux sans autorité ! Faire marcher une armée à son secours, c’eût été reprendre au point où elles étaient venues fatalement échouer, les gigantesques entreprises de Napoléon. Et pourquoi ? Pour forcer l’Autriche et la Prusse à conclure aussitôt avec les Russes une mortelle alliance, de manière à ce que nos soldats ne trouvassent plus à Varsovie, en y arrivant, qu’un emplacement désert et des tombeaux ? Reconstituer la Pologne ! Napoléon lui-même, à Tilsitt, n’y avait pas suffi, tout Napoléon qu’il était, et quoiqu’il eût sous lui cinq cent mille soldats invincibles. Or, ce que n’avait pu cet homme prodigieux qui avait coutume, en se jouant, de partager l’Europe avec son épée, les ministres de 1831 l’auraient-ils impunément essayé avec une armée incomplète, mal organisée encore, et composée de conscrits ? Reconnaitre la nationalité polonaise n’eût été qu’une forfanterie imprudente, dès que les moyens de soutenir cette déclaration manquaient. Le gouvernement avait