Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/501

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cia la réserve des devoirs dont la Belgique resterait chargée envers l’Europe, tout en voyant s’accomplir ses vœux de séparation et d’indépendance.

Chaque nation a ses droits particuliers ; mais l’Europe aussi a son droit : c’est l’ordre social qui le lui a donné.

Les traités qui régissent l’Europe, la Belgique, devenue indépendante, les trouvait faits et en vigueur elle devait donc les respecter, et ne pouvait pas les enfreindre. En les respectant, elle se conciliait avec l’intérêt et le repos de la grande communauté des États européens ; en les enfreignant, elle eût amené la confusion et la guerre. Les puissances seules pouvaient prévenir ce malheur, et puisqu’elles le pouvaient, elles devaient faire prévaloir la salutaire maxime, que les événements qui font naître en Europe un État nouveau, ne lui donnent pas plus le droit d’altérer le système général dans lequel il entre, que les changements survenus dans la condition d’un État ancien ne l’autorisent à se croire délié de ses engagements antérieurs : — Maxime de tous les peuples civilisés ; maxime qui se rattache au principe même d’après lequel les États survivent à leurs gouvernements, et les obligations imprescriptibles des traités à ceux qui les contractent ; maxime enfin qu’on n’oublierait pas sans faire rétrograder la civilisation, dont la morale et la foi publique sont heureusement et les premières conséquences et les premières garanties.

Le protocole du 20 décembre fut l’expression de ces vérités ; il statua : « Que la Conférence s’occuperait de discuter et de concerter les nouveaux arrangements les plus propres à combiner l’indépendance future de la Belgique avec les stipulations des traités, avec les intérêts et la sécurité des autres États, et avec la conservation de l’équilibre européen. »

Les puissances venaient d’indiquer ainsi le but auquel elles devaient marcher. Elles y marchèrent, forte de la pureté de leurs intentions et de leur impartialité. Tandis que, d’un côté, par leur protocole du 18 janvier, elles repoussaient des prétentions qui seront toujours inadmissibles, de l’autre, elles pesaient avec le soin le plus scrupuleux toutes les opinions qui étaient mutuellement émises, tous les titres qui étaient réciproquement évoqués. De cette discussion approfondie des diverses communications faites par les plénipotentiaires de sa majesté le roi des Pays-Bas et par les commissaires belges, résulta le protocole définitif du 20 janvier 1831.

Il était prévoir que la première ardeur d’une indépendance naissante tendrait à franchir les justes bornes des traités et des obligations qui en dérivent. Les cinq Cours ne pouvaient néanmoins admettre en faveur des Belges le droit de faire des conquêtes sur la Hollande ni sur d’autres États. Mais obligées de résoudre des questions de territoire essentiellement en rapport avec leurs propres conventions et leurs propres intérêts, les cinq Cours ne consacrèrent, à l’égard de la Belgique, que les maximes dont elles s’étaient fait à elles-mêmes une loi rigoureuse. Assurément elles ne sortaient ni des bornes de la justice et de l’équité, ni des règles d’une saine politique, lorsqu’en adoptant impartialement les limites qui séparaient la Belgique de la Hollande avant leur réunion,

elles ne refusaient aux Beiges que le pouvoir d’envahir : ce pouvoir,