Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/399

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virent aux avocats nommés d’office par M. Pasquier : « Jugez vous-mêmes, Messieurs, si votre dignité, si celle de l’ordre auquel vous appartenez, peuvent vous permettre de vous imposer aux accusés malgré eux, et de vous rendre complices d’une iniquité judiciaire sans exemple et des passions d’un ennemi sans pudeur. » Ils avaient en même temps choisi trois de leurs camarades, MM. Armand Marrast, Lebon et Landolphe, pour aller demander compte à M. Pasquier d’une persécution toute nouvelle même dans les fastes de l’arbitraire.L’entrevue fut étrange. Armé d’une froide politesse, M. Pasquier fit aux trois républicains, lorsqu’ils entrèrent, un salut d’homme de Cour. Ceux-ci s’inclinèrent à peine ; et ils s’avançaient, l’œil fier, l’indignation peinte sur le visage, lorsque M. Pasquier se jeta le premier dans son fauteuil, leur faisant signe ensuite de s’asseoir. Ils sourirent de ce puéril dépit, et s’exprimèrent d’un ton bref. Ils avaient reçu mission, non pas de faire revenir le président de la Cour des pairs sur une mesure qu’ils savaient bien irrévocable, mais de lui dire les sentiments qu’elle éveillait en eux. Aussi parlèrent-ils le langage de la menace, d’autant plus agressifs et intraitables, qu’ils étaient les plus faibles et que leurs ennemis disposaient du bourreau. L’entretien terminé, ils se levèrent si brusquement, que l’un d’eux, M. Landolphe, se heurta presque à un homme collé derrière la porte et qui n’avait pas eu le temps de se retirer. Cet écouteur indiscret était M. Decazes.

Les avocats nommés d’office par M. Pasquier ayant unanimement résolu de ne point obtempérer à des