Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/417

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tendu libre, un magistrat capable de venir proposer le jugement sur pièces ! Ainsi, ce que le tribunal révolutionnaire avait à peine osé contre Danton et Camille Desmoulins, au nom de la terreur, M. Martin (du Nord) demandait aux pairs du royaume de le tenter contre les républicains, au nom de la monarchie ! Que l’attitude des prévenus tendît à rendre le procès absolument impossible, c’est vrai ; mais, grâce au premier pas de la pairie dans l’arbitraire, ce n’était pas à la justice, c’était au contraire à la violation de son principe et de ses formes que les accusés résistaient. Il faut le dire : la Cour des pairs hésita, cette fois, à porter la main sur les armes qu’on lui tendait. Les descendants des Pasquier, des Molé, craignirent, peut-être, d’imprimer une trop grande tache à des noms qui avaient été autrefois l’honneur de la magistrature française. Les conclusions de M. Martin (du Nord) furent vivement combattues dans la Chambre du conseil. Leur adoption eût été le signal de la retraite de plus de trente pairs : on ne voulut pas se risquer davantage. Et toutefois, par un arrêt qui était un acheminement à la condamnation sur pièces et un commencement d’iniquité, on décida qu’en cas de tumulte, les accusés pourraient être amenés devant la Cour séparément, et que l’acte d’accusation ayant été personnellement signifié à chacun des prévenus, on pourrait le lire, même en l’absence de ceux qui se seraient fait exclure de l’audience. Ce fut alors que MM. de Talhouet et de Noailles cessèrent de participer au procès. « Monsieur le président, écrivit M. de Noailles à M. Pasquier, je vous prie de vouloir