Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/135

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rait-il dans la capitale, au milieu de l’agitation croissante des faubourgs ? Ou bien, avec les troupes qui servent d’ordinaire à la contenir, s’avancerait-il en rase campagne, appuyé sur leur fidélité douteuse et laissant derrière lui Paris embrasé ? Dans l’un et l’autre cas, la situation pour lui était terrible.

Mais il fallait l’emporter à Strasbourg. Louis Bonaparte s’y était ménagé des intelligences : il s’y rend en secret pour juger par lui-même de l’état des choses, convoque ses amis, les consulte. La réponse trompa son désir. Il trouvait des hommes incertains quoique très-dévoués à la mémoire de son oncle, et ne croyant qu’à demi au succès. Il repassa le Rhin, l’âme ouverte aux inquiétudes. Mais on ne renonce pas si vite à des espérances si, chères. D’ailleurs, le prince avait autour de lui des hommes qui l’excitaient, parce qu’ils jouaient sur les hasards de sa fortune.

Le département du Bas-Rhin était commandé, à cette époque, par un vieux soldat de l’Empire, le lieutenant-général Voirol. Louis Bonaparte avait compté sur lui, et lui avait demandé un rendez-vous dans une lettre aussi affectueuse que pressante. Le général Voirol s’abstint d’une démarche qui ne pouvait que le compromettre, et même il crut devoir parler à M. Choppin d’Arnouville, préfet de Strasbourg, des projets qu’on semblait nourrir aux portes de la France. Le préfet répondit, — d’après ce que le général Voirol a déclaré plus tard, — qu’il avait un agent auprès du jeune prince. D’un autre côté, l’éveil était donné au gouvernement. Un capitaine, nommé Raindre, avait reçu de Louis Bonaparte